Désinvestissement: des étudiants occupent le hall d’honneur de l’UdeM
Après l’Université McGill, c’est au tour des étudiants de l’Université de Montréal d’occuper le bâtiment principal de l’établissement d’enseignement supérieur pour exiger un désinvestissement de celui-ci dans les énergies fossiles. Deux étudiants ont entamé une grève de la faim en ce sens.
Depuis lundi matin, ils sont une vingtaine à avoir installé leurs tentes dans le hall d’honneur du pavillon Roger-Gaudry. Ils y dormiront et y mangeront durant au moins une semaine, en attendant des engagements clairs de l’UdeM.
«Ce que nous demandons, c’est le désinvestissement de la totalité des actifs de l’UdeM des énergies fossiles d’ici 2025, et que l’Université atteigne la carboneutralité d’ici 2030», explique Quentin Lehmann, l’un de organisateurs du mouvement, au milieu des tentes. Une pétition en ce sens avait recueilli plus de 4300 signatures, lundi après-midi.
L’étudiant en science politique souligne que les actifs du Fonds de dotation de l’Université et du Régime de retraite de l’Université de Montréal regroupent près de 100 M$ d’investissements directs et indirects dans le secteur des énergies fossiles.
«Nous ne sommes pas exactement sûrs du montant total de ces investissements parce qu’on refuse de nous donner l’information. C’est pourquoi nous souhaitons aussi que l’UdeM fasse preuve de transparence avec ces actifs», soutient l’étudiant.
M. Lehmann indique que même si le Régime de retraite ne relève pas directement de l’administration de l’Université, elle a tout de même un poids décisionnel fort puisqu’elle choisit certains des membres qui siègent au conseil d’administration.
Grève de la faim
«À défaut d’agir par crainte de la crise climatique, nous espérons que l’administration universitaire agisse parce qu’elle a peur de voir son image ternie», déplore pour sa part Vincent Vaslin.
En ce sens, l’étudiant au baccalauréat en science politique et en philosophie a entamé, depuis hier minuit, une grève de la faim. Il se contentera de boire de l’eau et du thé, et de prendre des vitamines.
«J’espère que cela sera un levier suffisant pour faire bouger l’Université», explique-t-il, indiquant que sa décision sera réévaluée chaque jour, mais qu’il se sent «motivé à pouvoir tenir longtemps».
«Nous ne pouvons plus céder»
«Je n’ai pas vraiment l’impression qu’on a le choix de faire ce type d’actions, car l’Université ne nous écoute pas», indique pour sa part Viviane Isabelle, une étudiante en anthropologie dont l’association est en grève cette semaine pour soutenir le mouvement.
Son association est l’une des 28 associations étudiantes qui ont pris position en faveur du désinvestissement. Une telle demande est aussi soutenue par le Syndicat général des professeurs de l’Université de Montréal.
«Ça fait 10 ans que nous demandons des actions concrètes de l’administration face à l’urgence climatique, rappelle Quentin Lehmann. Elle ne prend que des petites mesures qu’elle juge “convenables”, mais ce n’est pas suffisant.»
Nous ne pouvons plus céder.
Quentin Lehmann, étudiant au baccalauréat en science politique
L’étudiant indique que le mouvement a prévu une occupation d’une semaine, qui pourrait être reconduite si la réponse de l’établissement d’enseignement est jugée insatisfaisante.
Les manifestants invités à se déplacer
Dans un échange de courriel, l’Université de Montréal indique qu’elle respecte le droit de manifester. «Cela dit, les étudiants se trouvant [dans le hall d’honneur] depuis ce matin ont été invités à se déplacer vers un autre lieu, dans le but d’assurer la sécurité autant des manifestants que du personnel et de la communauté étudiante de l’UdeM», affirme sa porte-parole, Geneviève O’Meara.
Elle ajoute que des pourparlers sont toujours en cours et que l’administration souhaite «que cela se passe dans la collaboration».
En ce qui concerne les revendications des étudiants, la porte-parole rejette les accusations selon lesquelles l’institution n’en fait pas assez. «L’approche relative à l’investissement responsable de l’Université de Montréal s’insère dans le plan général de développement durable que nous mettons en œuvre, y compris la décarbonation des campus.»
En ce sens, elle mentionne «l’intégration des facteurs ESG [Environnement, social et gouvernance] dans la gestion du portefeuille», «l’utilisation de notre pouvoir d’actionnaire» et «l’établissement de cibles de réduction de l’intensité carbone moyenne pondérée de notre portefeuille d’actions (20% en 2025 et 35% en 2030)».
Mme O’Meara souligne aussi que l’Université réfléchit présentement à des scénarios de retrait des hydrocarbures et que ces scénarios seront examinés par les instances universitaires autorisées «d’ici quelques semaines».