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Québec ne paierait pas le traitement qui garde une Verdunoise en vie

Photo: Isabelle Bergeron/TC Media

Une septuagénaire de Verdun vit des heures difficiles depuis près de deux semaines. La femme qui est affectée par un cancer du pancréas métastatique depuis 2012 est traitée par un médicament à titre expérimental, l’Abraxane. Suite à une décision de Québec, la femme pourrait voir ce traitement ne plus lui être remboursé, la laissant avec une facture annuelle de près de 50 000$.

On lui donnait six mois à vivre et Noëlla Panneton est toujours en vie après deux ans et demi. La raison, l’Abraxane, un médicament normalement utilisé pour traiter le cancer du sein qui est actuellement testé sur les cas de cancer pancréatiques. Coût mensuel de ce traitement expérimental, 4000$.

Rencontrée la semaine dernière dans sa résidence de l’avenue Desmarchais, la femme s’est montrée discrète au sujet du stress que lui cause cette décision de l’Institut national d’excellence et services sociaux (INESSS). L’INESS trouve que le traitement coûte trop cher pour le rembourser.

Radieuse, assise en compagnie de son mari, dans leur salle à manger, Noëlla Panneton se souvient comme si c’était hier, de l’annonce de la gravité de son cas, le 12 juillet 2012.

Opérée pour des pierres à la vésicule biliaire, Mme Panneton s’est fait dire par le chirurgien qu’elle avait une tumeur au pancréas et des lésions au foie. «J’avais eu deux pneumonies et des douleurs au cours de l’année précédente, aussi je me disais, je dois avoir quelque chose de plus grave», confie Noëlla Panneton. Spontanément, son mari s’empresse de dire: «j’ai eu ma claque ce jour-là».

Battre les pronostics de plus de deux ans
«Le cancer du pancréas est une maladie grave qui progresse très rapidement », note l’étude menée par l’Institut national d’excellence en santé et services sociaux (INESSS) qui précise, «qu’à un stade métastatique, la survie globale médiane des patients est d’environ six mois.»

Dans les mois suivant son diagnostic, Mme Panneton s’est vue administrée des traitements de chimiothérapie mais ces derniers la rendaient malade. C’est à ce moment que son médecin, le Docteur Albert Moghrabi a pris la décision de lui faire essayer un traitement expérimental à l’Abraxane, médicament qui est pris par seulement quatre personnes au pays dans des cas de cancer du pancréas sous réserve d’un programme de compassion que la compagnie pharmaceutique assume sans limites. 30 mois plus tard, Noëlla Panneton est toujours en vie, grâce à ce traitement expérimental.

Recul de la maladie
Après qu’elle ait débuté les traitements, Noëlla Panneton a vu son état de santé se stabiliser. Les médecins n’est revenaient d’ailleurs pas de constater, examens de résonance magnétique et prises de sang à l’appui, le recul de la maladie chez cette septuagénaire pour laquelle aucun traitement antérieur ne pouvait assurer une aussi longue survie. Le Dr Moghrabi parle d’un taux de survie habituel de 10 à 12 mois maximum avec l’Abraxane.

La tumeur au pancréas a maintenant presque disparu et la tache sur le foie n’est plus là, a-t-on constaté à l’Hôpital de Verdun.

Le cancer au stade de maladie chronique
Noëlla Panneton reçoit le traitement aux deux semaines, et plus récemment aux trois semaines, tellement les choses vont bien.

Le Docteur Mustapha Tehfe, hémato oncologue spécialiste des tumeurs digestives ne tarit pas d’éloges au sujet du traitement. «Il n’y a pas de traitement curatif pour le cancer du pancréas et jusqu’à récemment, il n’y avait aucune option», soupire l’hématologue. Celui-ci estime qu’on trouvera bien les moyens de poursuivre le traitement. «On ne peut pas refuser une nécessité», insiste le spécialiste.

Un coup trop élevé?
Olivia Jacques, porte-parole de l’INESSS affirme que son organisation ne fait pas «d’âgisme», et «que le refus ou l’acceptation ne tient pas compte de l’âge des patients qui reçoivent tel ou tel médicament».

Le rapport déposé il y a quelques jours par l’Institut mentionne tout de même que l’Abraxane ne fait que prolonger de quelques mois la vie, à un coût beaucoup trop élevé selon l’organisme.  «Ce sont les compagnies pharmaceutiques, qui soumettent leur médicament à l’Institut». rappelle Mme Jacques.

Pour Me Paul G. Brunet, président du Conseil pour la protection des malades «Ce qui nous importe au Conseil, c’est que les patients reçoivent les soins auxquels ils ont droit».

Me Brunet s’inquiète d’une interprétation trop stricte de la Loi sur la Santé et la mission que se donne le ministère. La Loi prévoit qu’en retrouvant la santé, le patient pourra participer au développement économique selon l’avocat Brunet, qui déduit «que votre valeur ne compte pas lorsque l’âge vous rend moins productif, d’où l’âgisme». «C’est une sorte d’attitude qui se développe et qui nous semble troublante», commente le défenseur des malades.

L’Abraxane en bref
Utilisé depuis 2009 pour soigner in extremis les patientes atteintes du cancer du sein métastatique, l’Abraxane produit par les laboratoires Celgem, est administré seul ou en combinaison avec un autre médicament.

Liophilisé comme le café instantané, le médicament qui a l’apparence du lait en poudre, doit être dilué et brassé à la main par une infirmière qui ensuite l’injecte par intraveineuse. Par la suite, un soluté termine le traitement en guise de «rinçage». «Le tout prend au plus 45 minutes.

Le coût du traitement à l’Abraxane est évalué entre 3000$ et 4000$ par mois, une facture qui pèse lourd dans la balance pour l’INESSS, qui ne recommande pas l’inscription de cette molécule sur la liste des médicaments remboursés.

En Colombie-Britannique, 45% des patients sont éligibles au traitement à l’Abraxane. De plus des essais cliniques de l’Abraxane sur 860 patients dans l’ensemble du Canada, ont été administrés, dont 63 au Québec avec des résultats jusqu’ici encourageants.

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