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Récit d’une vie à la Jenkins

Photo: TC Media/Patrick Sicotte

Avec l’arrivée imminente des premières constructions dans Lachine-Est, des propositions sont mises de l’avant afin d’établir un plan d’urbanisme de l’ancien quartier industriel de l’arrondissement. Comme plusieurs citoyens soucieux de l’avenir du secteur, l’ancien travailleur de l’usine Jenkins, Bernard Synnett, s’intéresse au développement de ces lieux, qui ont marqué près de 30 ans de sa vie.

«Je connaissais très bien la place. J’ai même participé au démantèlement de l’usine. J’ai été là jusqu’au dernier souffle de l’entreprise», se souvient l’homme de 71 ans, qui était contremaître à l’entretien de l’ancienne fonderie.

La compagnie Jenkins Valves, autrefois située sur le boulevard Saint-Joseph, à l’angle de la rue George V, a fait faillite en février 1992. «Jamais je n’aurais pensé que ce bout de terrain disparaîtrait et que je verrais des maisons s’y bâtir. Quand j’étais jeune, je croyais que ce serait là pour la vie», soutient le natif de Sainte-Bernadette-de-Pellegrin, nostalgique.

Deuxième maison
Issu d’une famille de 10 enfants, Bernard Synnett a quitté sa Gaspésie natale en 1960 pour rejoindre ses sœurs aînées dans la métropole. Il a été embauché à l’usine Jenkins à l’âge de 18 ans. «J’y ai gagné ma vie. Durant ces années, j’ai élevé ma famille. J’ai bien vécu», se remémore le père d’un fils aujourd’hui âgé de 43 ans.

De fil en aiguille, l’usine Jenkins est devenue sa deuxième maison. Matin et soir, l’ancien marathonien – qui court encore aujourd’hui – se rendait à pied dans le secteur de Lachine-Est, beau temps mauvais temps.

Les années passées à l’entretien général lui ont d’ailleurs permis de connaître la bâtisse de fond en comble. «Peu de gens savent qu’il y avait un réseau de tunnels souterrains. On pouvait rejoindre la fonderie jusqu’au bureau. Le passage permettait d’atteindre une série de tuyaux pour le chauffage», confie-t-il.

Explosion
Son passage à l’usine Jenkins aura marqué sa vie de bien des façons. Un matin d’avril 1987, Bernard Synnett et cinq autres ouvriers ont été brûlés lorsqu’une fournaise de métal en fusion a explosé et les a éclaboussés.

Comme les marques sur son corps, cet événement a laissé des traces. «Quand c’est arrivé, tout est devenu noir. J’étais sur une plate-forme et j’ai dû sauter d’une hauteur d’environ huit pieds, même si je ne voyais rien. Les premiers temps, ça fait réfléchir. Quand tu t’en sors, tu te dis que la vie est belle», raconte le grand-père d’une fille de 15 ans et d’un garçon de 13 ans.

Malgré de sérieuses blessures, les cinq autres ouvriers s’en sont sortis vivants.

Avenir
Après la fermeture de l’usine, Bernard Synnett a travaillé à son propre compte. Celui qu’on peut croiser au volant de sa moto Harley-Davidson effectue toujours des ouvrages à l’occasion.

S’il planifie ses vieux jours aux côtés de sa femme, il ne peut s’empêcher de penser à l’avenir des générations futures qui grandiront à leur tour dans Lachine-Est.

«Quand tu as gagné une partie de ta vie à cet endroit, tu veux suivre son évolution. Il faudra que ce soit bien préparé, puisque ce sera difficile de revenir en arrière et de corriger», conclut l’ancien travailleur de la Jenkins.

Le rapport de la Corporation de développement économique communautaire (CDEC) LaSalle-Lachine, qui servira à l’élaboration du plan d’urbanisme de Lachine-Est, est disponible sur le site web de l’organisme.

L’arrondissement amorcera les étapes suivantes pour le développement du quartier et pour en élaborer le plan d’urbanisme l’année prochaine.

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