Soutenez

Au temps des vétérans

Bousquet-Richard Simon - TC Media
Le retour des vétérans de la Deuxième Guerre mondiale a radicalement changé Montréal-Nord, transformant le paysage bucolique en petite ville de maisons en briques rouges alignées comme une brigade de soldats.

René Labelle habite à Montréal-Nord depuis 77 ans. De la campagne désertée à l’arrondissement populeux, il a vu le quartier évolué.

«Montréal-Nord a commencé à se développer quand le gouvernement fédéral a bâti des maisons pour les vétérans. Là, ça grouillait! On a eu les égouts et des rues», se souvient M. Labelle.

Plusieurs de ces petites maisons de briques rouges construites entre la rue de Charleroi et le boulevard Perras ont d’ailleurs survécu au passage du temps.

Avant la guerre

La famille Labelle est arrivée sur la rue Pigeon en 1937, lorsque le père de M. Labelle a obtenu un poste d’instructeur au pénitencier Saint-Vincent-de-Paul à Laval. À l’époque, il n’y avait que quelques maisons parsemées dans les champs du nord de l’Île.

«Quand j’avais 12 ans, on appelait ça Montréal-Mort, parce qu’il n’y avait rien ici. Il n’y avait que des champs», raconte M. Labelle.

Chaque printemps, les pompiers allumaient des feux dans les champs de Montréal-Nord pour éviter les feux de broussaille.

À l’époque, les gens vivaient pauvrement.

«Je me souviens du sergent de la police de Montréal-Nord. Il avait cinq ou six filles. Il n’avait pas assez d’argent pour leur acheter des culottes. Et, quand son cheval voulait boire, sa femme ouvrait la fenêtre pour qu’il boive à l’intérieur», raconte M. Labelle.

Le vétéran se souvient de ses plaisirs de jeunesse. À l’époque, il servait la messe tous les jours pour gagner ses cinq cents qui lui permettaient de payer une tournée de boisson gazeuse «chum» à ses amis ou d’acheter un paquet de cigarettes Turret.

Pour faire un peu d’argent de poche durant l’été, les jeunes de Montréal-Nord ramassaient des fraises dans une ferme où se trouve maintenant l’hôtel de ville.

Les résidents de Montréal-Nord avaient aussi peu de moyens de s’éduquer. M. Labelle raconte qu’après avoir terminé sa huitième année, il devait se rendre au collège Laval en bicyclette.

«J’y suis allé une demie année, mais pédaler dans la neige, ça ne marchait pas, alors j’ai lâché. J’ai commencé a travailler», affirme M. Labelle.

La guerre

M. Labelle avait 14 ans quand la guerre a .t. déclarée et que son frère Conrad s’est enrôlé dans l’aviation. C’est d’ailleurs durant cette période que le rêve de voler a germé son esprit.

«Dans ce temps-là, quand un avion passait, tout le monde s’arrêtait pour le regarder. C’était fascinant!», explique le vétéran.

Les avions ne faisaient pas seulement rêver le jeune Labelle. Avec ses copains, ils mettaient toutes leurs économies en commun pour s’acheter des boîtes de Corn Flakes Jumbo.

«Ce n’était pas les céréales qui nous intéressaient. C’était les pièces de bombardier qu’on pouvait découper dans la boîte. On passait des après-midi sur la galerie à découper ça. C’était tout un événement quand on réussissait à en bâtir un», se souvient M. Labelle.

Avec le déclenchement de la guerre, M. Labelle a vu sa chance d’enfin monter à bord d’un avion. L’homme s’est lui-même enrôlé dans l’aviation dès qu’il a eu 18 ans.

Le soldat a alors suivi plusieurs formations à l’Île-du-Prince-Édouard, à Trois-Rivières, puis en Angleterre.

Comme son frère, M. Labelle est devenu mitrailleur d’aviation. Sa position de prédilection était sur le toit des avions Wellington. S’il a finalement volé, il n’a toutefois jamais touché aux commandes d’un avion.

Une ville de vétérans

À son retour de la Guerre, M. Labelle est revenu à Montréal-Nord où il s’est marié et où il a construit sa maison. Il ne se doutait pas que quelques années plus tard, son petit village deviendrait une ville de vétérans.

Dans les années 1950, lorsque le gouvernement a construit les maisons pour les anciens combattants, plusieurs d’entre eux sont venus s’y établir.

M. Labelle raconte que les vétérans ont ainsi vécu entre eux pendant quelques années.

«Ç’a changé parce qu’il y bien des vétérans qui ont vendu leur maison alors, c’est devenu une population mixte», explique M. Labelle.

L’arrivée des vétérans et la construction des installations sanitaires ont aussi attiré d’autres personnes à venir s’établir à Montréal-Nord.

Articles récents du même sujet

Mon
Métro

Découvrez nos infolettres !

Le meilleur moyen de rester brancher sur les nouvelles de Montréal et votre quartier.