Le bar de la discorde
Depuis l’annonce du projet, au mois de mai, les activités de mobilisation citoyenne se multiplient. Formation d’un comité, création d’un site Internet, pétition; tous les efforts sont déployés pour empêcher l’ouverture du futur bar aux abords d’une garderie et d’un établissement préscolaire, « ce qui n’est pas la meilleure chose pour le quartier », a fait valoir Gilles Dextraze, du comité de citoyens, lors de la rencontre du comité Lève-tôt de La Petite-Patrie
Une assemblée publique d’information avec les promoteurs a même été organisée au mois de juillet. Malgré tout, les citoyens restent farouchement opposés au projet, craignant que ce nouvel établissement entraîne une recrudescence des incivilités (tapage nocturne, malpropreté, activités illicites, etc.).
« Il y a 10 ans, il y avait un bar rue Beaubien, en face de celui que l’on projette ouvrir. À l’époque, le concierge de l’école Saint-Ambroise devait faire le tour du secteur tous les matins pour ramasser condoms et seringues. Un jour, il a oublié une aiguille et une enfant s’est piquée. Par chance, elle n’a rien eu », a relaté le commissaire scolaire Kenneth George, qui assistait à la rencontre, soulignant qu’il appuyait la démarche citoyenne.
Puisque le projet de bar est conforme à la réglementation et au zonage en vigueur dans l’arrondissement Rosemont – La Petite-Patrie, l’administration locale n’a eu d’autre choix que d’émettre le certificat d’occupation aux promoteurs, malgré le tollé causé au sein de la population.
Toutefois, ceux-ci sont toujours en attente d’un permis pour l’opération d’un débit de boisson de la Régie des alcools, des courses et des jeux. Le comité de citoyens souhaite donc intercéder auprès de cette instance pour bloquer l’ouverture prochaine du bar. Les contestataires seront entendus à l’occasion d’une audition dont la date n’a pas encore été fixée.
Laisser une chance au coureur
Anthoni Jodoin, l’un des promoteurs du futur bar du 1290, rue Beaubien Est, déplore la tempête qui entoure son projet. D’ailleurs, il mentionne que les activités de son établissement ne se dérouleront pas en même temps que celles des écoles et garderies avoisinantes. Il entend donc aller de l’avant.
« On a tout fait selon les règles, on respecte toutes les lois. On a même été plus loin en se présentant à l’assemblée publique, et ce, sans aucune obligation, pour montrer notre bonne foi », a-t-il indiqué.
Il souhaite remettre les pendules à l’heure, estimant que plusieurs faussetés ont été colportées.
« Il y a eu des rumeurs qu’on allait faire un bar à la Saint-Sulpice, sur trois étages; ce qui est absolument faux. Nous ce qu’on veut faire, c’est un bar de quartier.
« Il y a souvent de mauvaises perceptions qui viennent avec le concept de bar : on imagine des associations de bikers, de la drogue, etc. On n’a pas du tout un projet de taverne avec des loteries vidéo. Il faut nous laisser le temps d’ouvrir [pour voir] », a-t-il plaidé sur la défensive, ajoutant qu’il souhaite ouvrir un établissement de style lounge, avec une cuisine élaborée, s’adressant aux 30-40 ans.
Il assure que toutes les mesures possibles seront déployées pour minimiser les impacts néfastes sur la quiétude du quartier (présence de portiers, pancartes de sensibilisation, etc. ), même s’il concède que « ce n’est pas impossible que le week-end, ça soit plus achalandé ».
« La rue Beaubien est une rue commerciale. Si tu habites près d’une telle rue, tu dois être conscient qu’il risque d’y avoir des commerces qui vont ouvrir, et ça ne sera pas forcément juste des cafés et des boulangeries. Tu dois t’attendre à avoir du bruit.
« Ça se peut qu’il y ait des désagréments pour les résidents. Je ne peux pas contrôler tous les clients qui vont sortir de mon établissement. Si quelqu’un sort saoûl à 3 h 30 et se met à chanter en pleine rue, c’est un des désagréments que je ne peux pas contrôler. Mais j’espère que ça ne se produira pas », a-t-il soutenu.