Prendre un café avec son tournevis
Prendre un espresso tout en bidouillant dans votre bouilloire ou un grille-pain défectueux au café du coin vous semble cocasse? Pourtant, c’est exactement ce que veut encourager un nouveau commerce de Villeray qui propose de redonner une deuxième vie aux appareils électroniques de sa clientèle.
L’idée novatrice de Mon Atelier, situé au 1201, rue Jean-Talon Est, c’est un peu la cristallisation des « Repair café », des événements éphémères lors desquels on se rassemble pour apprendre à rabibocher électroménagers et électroniques.
« Le concept est très populaire en Europe. On s’est dit, « est-ce qu’on essaye de le faire en continu, de façon permanente? » Cependant, ce n’est pas tout le monde que ça intéresse, ça nous prenait donc différentes portes d’entrée, c’est pour ça qu’on a fait un café. Ça vient rejoindre M et Mme Tout-le-Monde », souligne Annick Girard, cofondatrice de Mon Atelier.
Lors du jour d’ouverture vendredi 7 février, on peut constater que l’idée semble fonctionner.
Dans le café on retrouve des parents avec la marmaille aux bras, tempête de neige et écoles fermées obligent, et d’autres personnes du quartier. Si plusieurs d’entre eux sont simplement venus chercher un moment de répit, quelques-uns discutent avec les propriétaires et découvrent la mission de Mon Atelier.
Déjà, certains proposent leurs services de réparateurs.
« Il y a beaucoup de personnes âgées dans le coin qui passent et qui nous posent des questions. On aime ça et on veut les impliquer dans le projet. On va avoir des ateliers lors desquels ils feront part de leur expérience. C’est le transfert de connaissance qui est intéressant », affirme Mme Girard.
Cette dernière s’est lancée dans cette aventure avec quatre autres partenaires, afin de créer un local offrant ainsi deux espaces. À l’avant on retrouve un petit café zéro déchet, tandis qu’à l’arrière du comptoir se situe une seconde salle dans laquelle se tiennent chaque semaine une multitude d’activités, de cours de yoga à la projection de films, en passant par des ateliers en tout genre.
« La réparation, ça peut avoir des impacts autant sur les plans social, économique ou environnemental. Si on répare soi-même, on peut économiser énormément. C’est aussi rare qu’on puisse tout réparer, donc socialement il faut être en contact avec quelqu’un, il y un partage de connaissances, et c’est très riche, on peut briser l’isolement. Ça nous permet de changer nos comportements de consommation et de démystifier nos appareils » – Annick Girard, cofondatrice de Mon Atelier.
Même l’entreprise au-dessus du café prend part à l’initiative. La boutique iPhoenix Montréal, experte dans la réparation des produits Apple, se prêtera au jeu en proposant des activités lors desquelles on pourra apprendre à démonter un cellulaire ou une tablette pour mieux comprendre son fonctionnement.
Grâce à leur abonnement, les clients peuvent avoir accès à un certain nombre d’heures par mois et à une « matériothèque » offrant « des vis, de la colle, des boulons recyclés », afin que les personnes puissent y réparer ponctuellement leurs objets. De plus, on pense rendre disponibles des outils plus spécialisés dans un garage éventuellement aménagé dans le sous-sol des lieux.
Consommation des électroniques au Canada
Selon une enquête menée par Équiterre en 2018 auprès de 2 202 répondants, « seulement 15 % d’entre eux n’ont acquis aucun appareil électroménager dans les deux dernières années et 17 % dans le cas des appareils électroniques ».
De plus, 80 % des personnes sondées ont acheté leur appareil neuf, indiquant une faible propension vers le réemploi.
Même si la principale raison du remplacement est due au fonctionnement de l’appareil, peu ont eu recours à la réparation. Seulement 19 % des répondants l’ont fait dans le cas des appareils électroménagers contre 26 % pour les appareils électroniques