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Le racisme ne prend pas de répit

Dalila Awada
Photo: Métro

Les nouvelles vont vite. L’attaque raciste qui s’est produite le 6 juin dernier à London en Ontario n’est plus au cœur de l’actualité. Les vigiles, les discours, les salam aleikum des politiciens, s’éloignent à mesure que d’autres nouvelles défilent. 

Le racisme, lui, ne se dissipe pas lorsque les manchettes changent. Pour celles et ceux qui en sont la cible, il reste là, omniprésent, insidieux. En étudiant les conséquences psychologiques du colonialisme, Frantz Fanon montrait, il y a plus de 60 ans, que le racisme et ses déclinaisons génèrent des traumatismes qui persistent une vie entière. C’est une humiliation qui ne tarit jamais.

Être ciblé∙e, délégitimé∙e, méprisé∙e, violenté∙e pour qui on est, c’est-à-dire pour quelque chose qu’on ne peut délaisser, a quelque chose de particulièrement sordide.  

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Les meurtres motivés par le racisme ne tombent pas du ciel. Il faut, au préalable, que l’Autre soit dépeint et perçu comme une nuisance, comme un être dépourvu de valeur. Certains contextes sociopolitiques facilitent le maintien de telles perceptions. En ce sens, les actes racistes convoquent la responsabilité de toute une société et pas seulement celles d’individus lambda. 

À la suite d’épisodes troublants, je scrute les réactions de politicien∙nes. Les banalités qui se disent et les petits gestes symboliques qui se posent me décrochent des soupirs exaspérés. Bien sûr qu’ils trouvent cette violence tragique et condamnable, mais font-ils le lien entre l’image des musulman∙es, malmenée à outrance partout en Occident, et les peak de violence, comme à London ? Savent-ils comment les musulman∙es sont devenus, au fil du temps, des indésirables, des ennemis absolus ? 

Le racisme les empêche-t-il de dormir la nuit ? 

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Le sort de la famille Afzaal-Salman confronte le mythe d’un Canada qui a dépassé le racisme pur et dur; les manifestations de ce racisme seraient plutôt une anomalie qui ne doit pas ternir l’image du pays. Mais le racisme se fout des drapeaux et des nobles déclarations sur le vivre-ensemble. En réalité, l’islamophobie est à ce point banalisée et mondialisée qu’elle n’épargne aucune société. Ni le Canada, ni la Nouvelle-Zélande, ni la Norvège, où «il fait bon vivre» et où l’on considère que les phénomènes racistes les plus extrêmes sont (illusoirement) tenus à distance. 

Cette pensée a quelque chose de terrifiant et de décourageant. Mais quand je crains une longue dégringolade qui tire toujours plus bas et qui laisse toujours plus amoché, je suis rassurée de lire, d’entendre et de voir en action, une multitude de personnes qui ne minimisent pas le racisme et qui ne nient pas l’islamophobie. 

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En lisant récemment La pensée blanche, du footballeur Lilian Thuram, je trouvais là aussi un peu de réconfort, car il insiste sur le fait que, de toutes les époques, des individus se sont levés contre le racisme et contre les injustices que subissaient des groupes déshumanisés. Que ce soit au cœur de la période esclavagiste ou pendant la guerre d’Algérie ou encore lors de la guerre civile aux États-Unis, des personnes, qui n’étaient pas directement visées par les injustices combattues, se sont montrées solidaires. Elles ont refusé d’être complices de l’assujettissement et de la haine d’autrui. 

D’une époque à l’autre, ces voix alliées sont cruciales. 

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