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Coronavirus: exagère-t-on la désinfection des surfaces?

Une personne tient une barre dans un wagon de métro.
La Société de transport de Montréal a augmenté la fréquence de nettoyage des surfaces du réseau du métro en raison de la pandémie. Photo: Josie Desmarais/Métro

Les autorités sanitaires et les entreprises ont-elles exagéré l’importance de désinfecter régulièrement les surfaces afin de prévenir la propagation du coronavirus? Un expert en santé publique remet en question les études portant sur la durée de vie du virus sur celles-ci.

Le professeur Emanuel Goldman, du département de microbiologie, de biochimie et de génétique moléculaire à l’Université Rutgers, au New Jersey, a publié vendredi dernier un commentaire scientifique sur le site web de la revue médicale The Lancet. L’expert y souligne que plusieurs études réalisées dans les dernières semaines ont fait état d’une survie du coronavirus sur les surfaces sèches et les objets pouvant varier de deux à six jours.

Or, «aucune de ces études ne présente des scénarios s’apparentant à des situations de la vie réelle», soulève M. Goldman. Les chercheurs à l’origine de celles-ci auraient alors utilisé un «très large» échantillon du virus par rapport aux gouttelettes qu’émettent les personnes contagieuses lorsqu’elles éternuent, par exemple.

«Dans une étude où les auteurs ont tenté de recréer les conditions actuelles dans lesquelles une surface pourrait être contaminée par un patient, aucun [coronavirus] n’avait été détecté sur les surfaces», ajoute l’expert. D’autres recherches font pour leur part état d’une survie du virus de quelques heures seulement sur différentes surfaces sèches.

«Les chances de transmission par les surfaces inanimées sont très minces.» -Emmanuel Goldman

Trop de précautions?

M. Goldman termine son commentaire en remettant en question les mesures de désinfection prises dans plusieurs lieux publics. À Montréal, par exemple, la Ville a décidé pendant la pandémie de fermer les modules de jeux pour enfants dans ses parcs parce qu’elle ne pouvait assurer leur désinfection régulière. De nombreuses entreprises, incluant les épiceries et les pharmacies, ont aussi accru le nettoyage des surfaces à contacts multiples. La Société de transport de Montréal a également augmenté considérablement la fréquence de nettoyage de son réseau de bus et de métro en raison de la pandémie.

«Je ne suis pas en désaccord avec le principe de la prudence, mais cela peut aller à des extrêmes qui ne sont pas justifiés par les données», ajoute M. Goldman. L’expert reconnaît néanmoins la pertinence d’appliquer des protocoles de nettoyage accrus dans les hôpitaux.

Le principe de prudence

De plus en plus d’études penchent en effet pour un risque faible de contamination par les surfaces. C’est notamment le cas d’une recherche effectuée en mai par le Centre américain pour le contrôle et la prévention des maladies. Celle-ci souligne que la contamination au coronavirus par des objets, bien que possible, est plutôt rare.

«En tant qu’épidémiologiste, le premier réflexe demeure la prudence quand on connait mal un agent infectieux émergent. Alors, peut-être en faisons-nous un peu trop, mais honnêtement, cette option est nettement préférable à une alternative de ne pas en faire assez», a réagi à Métro la professeure à l’École de santé publique de l’Université de Montréal, Hélène Carabin.

Le professeur au département des sciences biologiques de l’Université du Québec à Montréal, Benoit Barbeau, estime également que la désinfection «à outrance» au début de la pandémie était «louable», compte tenu de l’information dont disposaient alors les experts en santé publique. Il est maintenant temps de revoir certaines de ces pratiques à la lumière des récentes études, estime-t-il toutefois.

«Il faut peser le pour et le contre et revoir l’utilité d’une décontamination exhaustive», souligne l’expert, qui rappelle qu’une exposition régulière à certains produits nettoyants peut avoir des effets nocifs sur la santé. Si l’expert reconnaît la pertinence de nettoyer fréquemment les surfaces dans le métro, il questionne celle de désinfecter régulièrement des aires de jeux pour enfants ou encore les rampes d’accès aux piscines publiques, par exemple.

«Il n’y a pas lieu d’avoir des mesures de précaution si exhaustives», tranche l’expert, qui souligne que le port du masque, le lavage des mains et le respect de la distanciation physique sont les mesures sanitaires à privilégier dans les lieux publics fermés.

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