Un voyage en enfer
Mélanie Carpentier n’a jamais été membre d’un gang de rue, mais elle en a côtoyé quelques-uns à la fin de son adolescence, ce qui lui a donné un avant-goût de l’enfer. Son expérience, elle la partage sans pudeur avec qui veut l’entendre.
Rencontrée dans un café de Montréal-Nord, Mélanie Carpentier ne dégage pas cette colère ou même cette dureté qu’on attendrait – peut-être par préjugé – d’une personne qui a fréquenté des groupes criminels. Assise tout au fond de la salle, la trentenaire repère rapidement les visages familiers et leur adresse un sourire, quand elle ne leur fait pas carrément l’accolade.
Aujourd’hui, la jeune femme est bien dans sa peau, mais ça n’a pas toujours été le cas. Adolescente, elle a été victime d’un grave accident de la route. Après trois mois de traitement, elle est revenue de peine et de misère à l’école.
«J’avais les yeux croches, la mâchoire fracturée, et je venais de réapprendre à marcher, raconte-t-elle. Les amis, oublie ça!»
La tentation
Ostracisée, malheureuse et vulnérable, elle a commencé à côtoyer des membres de gangs de rue au secondaire. À 17 ans, alors qu’elle habitait en appartement avec une amie, elle les a fréquentés plus assidûment parce qu’elle recevait enfin l’attention dont elle avait tant besoin plus jeune.
«J’étais consciente des choix que je faisais, raconte-t-elle. Je n’ai pas été une victime. Je ne savais pas jusqu’où ça pouvait aller, mais il y avait quelque chose qui m’attirait vers les gangs de rue. Je pensais que j’étais devenue quelqu’un.»
«Quand on ne te donne ta place nulle part, mais qu’on t’en offre une dans la rue, tu la prends», ajoute-t-elle.
Les délits criminels
Vols, fraude, trafic de stupéfiants, voies de fait, menace de mort, Mélanie Carpentier a multiplié les délits. Elle a aussi dansé nue et elle s’est prostituée, à son compte. Jamais pour les gangs de rue.
«Je ne sais pas pourquoi j’ai fait tout cela, dit-elle. Ça me tentait à l’époque.»
Rapidement, elle a commencé à consommer de la drogue. «J’avais beau travailler et gagner 1 000 $ par jour, je n’avais jamais une cent dans mes poches. J’étais tout le temps gelée.»
Les conséquences de ses actes
Les conséquences que ses choix ont eu pour son fils lui ont permis de réaliser que son affiliation avec les gangs de rue allait trop loin. Peu à peu, elle a pris ses distances pour faire des études. Pour prouver qu’elle était meilleure qu’eux. Puis, elle a flambé 3 000 $ en une fin de semaine pour de la drogue. Cette fois, c’était trop. Elle a fait des démarches pour entreprendre une thérapie.
«Ce n’est pas difficile de comprendre qu’on a un problème, dit-elle. À partir du moment où on le constate, il y a 50 % du chemin de fait. Ce qui est dur, c’est de faire face aux erreurs qu’on a commises.»
Aujourd’hui, Mélanie Carpentier s’est reprise en main. Elle poursuit ses études à l’université en intervention auprès des jeunes. L’an prochain, elle décrochera son baccalauréat. En plus, elle est intervenante à l’école Jean-Grou. Elle aide les jeunes filles à améliorer leur estime d’elles-mêmes. Et elle donne près d’une centaine de conférences par année pour raconter son histoire.
«C’est une façon pour moi de rendre à la société ce que j’y ai pris», avoue-t-elle.
Pour joindre Mélanie Carpentier : ne_de_nouveau@hotmail.com