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Toronto tourne la page sur une année meurtrière

Cole Burston / La Presse Canadienne Photo: Cole Burston
Liam Casey, La Presse canadienne - La Presse Canadienne

TORONTO — L’escouade des homicides à la police de Toronto a connu une année particulièrement éprouvante: elle a dû enquêter sur un nombre record d’assassinats, se débattre avec une hausse des crimes violents liés aux gangs, s’expliquer sur un laxisme présumé dans certains dossiers, et composer avec plusieurs affaires complexes qui ont essoufflé ses ressources.

Le nouveau directeur de l’escouade réorganise l’unité pour 2019 en augmentant l’effectif et en lançant notamment une unité spécialisée dans l’analyse des vidéos, afin de résoudre plus d’affaires, plus rapidement. «Si le taux se maintient à 90 ou 100 meurtres par an, nous devrons repenser la façon dont nous gérons les enquêtes», a estimé l’inspecteur-chef Hank Idsinga, dans une entrevue au siège de la police.

Toronto a enregistré 96 homicides en 2018, un chiffre qui a battu le record de 89 homicides remontant à plus de 25 ans, en 1991. Selon M. Idsinga, environ 70 pour cent de ces meurtres ont été résolus — ce qui signifie aussi, par ailleurs, que des enquêteurs devront passer en 2019 des jours et des jours au palais de justice pour témoigner aux procès.

Les statistiques de la police de Toronto indiquent que 51 des homicides de l’année ont été commis par des armes à feu, 20 par agressions au couteau et 15 par «d’autres moyens»; l’attentat à la fourgonnette bélier en avril a fait à lui seul 10 morts.

Le directeur de la police de Toronto, Mark Saunders, a attribué cette hausse à une augmentation de la violence liée aux gangs. Mais le service de police a aussi fait remarquer que le nombre d’homicides était resté relativement stable depuis 1991 même si la population de la métropole canadienne a considérablement augmenté depuis. Toronto comptait 2,3 millions d’habitants en 1991, comparativement à 2,7 millions d’habitants en 2016 — une hausse de 17,4 pour cent en 25 ans.

M. Idsinga, âgé de 51 ans, a été informé début décembre qu’il était officiellement nommé à la tête de l’escouade des homicides. C’est lui qu’on a vu à plusieurs reprises en 2018 dresser ponctuellement le bilan de l’enquête sur le présumé meurtrier en série Bruce McArthur, qui fait face à huit chefs de meurtre au premier degré relativement à la mort d’hommes liés au village gai de Toronto.

Il signale en entrevue que six enquêteurs ont déjà été recrutés au sein de l’escouade pour alléger la charge de travail des 48 enquêteurs de l’unité. Une nouvelle unité consacrée aux personnes disparues a également commencé à fonctionner, avec quatre enquêteurs, à la suite des plaintes de la communauté sur la façon dont la police avait traité jusqu’ici ces cas. Ainsi, des membres de la communauté LGBTQ soupçonnaient depuis un certain temps déjà qu’un tueur en série s’en prenait peut-être à des hommes dans le village gai, avant que la police n’arrête Bruce McArthur.

Toronto n’est plus la même

Selon le chef Saunders, l’attentat à la fourgonnette bélier et la fusillade du quartier grec en juillet, qui a fait deux morts, ont changé la donne à Toronto. «C’est une chose d’avoir affaire à des armes à feu, c’en est une autre quand tu marches dans la rue et que tu dois surveiller au-dessus de ton épaule», admettait-il la semaine dernière.

Plusieurs autres incidents liés aux armes à feu ont frappé sa ville cette année, dont l’assassinat en plein jour du rappeur émergent Smoke Dawg et du producteur de hip-hop Ernest Modekwe, en juin, sans compter les nombreuses «fusillades au volant» et une autre dans un terrain de jeu, qui a blessé deux jeunes filles.

L’inspecteur-chef Idsinga espère déposer bientôt son rapport sur la fusillade à Greektown lors d’une réunion du comité de la sécurité publique — puisqu’il n’y aura pas d’accusations, l’auteur de la fusillade s’étant suicidé.

L’escouade des homicides termine également son enquête sur Bruce McArthur, persuadée qu’il n’a pas fait d’autres victimes, a déclaré M. Idsinga. Des policiers et des chiens ont fouillé une centaine de propriétés liées au paysagiste et n’ont rien trouvé, a révélé l’inspecteur-chef, qualifiant cette affaire de plus importante enquête médico-légale de toute l’histoire de la police de Toronto. Le service des dossiers non résolus continue par ailleurs d’examiner des affaires remontant aux années 1970, mais jusqu’à présent, aucun de ces décès n’a pu être lié à Bruce McArthur, soutient M. Idsinga.

Par ailleurs, le meurtre non résolu du couple de milliardaires Barry et Honey Sherman, retrouvés morts chez eux fin 2017, tarabuste toujours l’escouade des homicides. La famille a critiqué la police pour ses nombreuses «erreurs et omissions» présumées, et elle a récemment offert une récompense de 10 millions $ pour faire débloquer l’enquête.

Globalement, M. Idsinga espère surtout que le nombre d’homicides sera moins élevé en 2019 à Toronto. «Nous sommes très fatigués, avoue-t-il en se frottant les tempes. Le rythme s’était vraiment accéléré à l’été 2017 et il est demeuré constant depuis un an.»

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