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Préparer l’avenir

PARIS, FRANCE - NOVEMBER 15: Members of the public gather to lay flowers and light candles at La Belle Equipe restaurant on Rue de Charonne following Fridays terrorist attack on November 15, 2015 in Paris, France. As France observes three days of national mourning members of the public continue to pay tribute to the victims of Friday's deadly attacks. A special service for the families of the victims and survivors is to be held at Paris's Notre Dame Cathedral later on Sunday. Photo: Getty Images

Les événements de Paris sont d’une grande tristesse. Plus affligeante encore serait une réaction mal avisée. La réponse française, et celle de tous les «pays amis», contiendra en elle les germes du futur. Nous ne pouvons pas contrôler l’avenir, mais nous pouvons le préparer, en choisissant soigneusement la réponse à donner à cet événement. De quoi voulons-nous que demain soit fait?

Les attentats comme ceux de Paris sont horrifiants, car ils sont à la fois brutaux et aléatoires. Les assaillants ont tué des gens complètement innocents, leur sort ayant été déterminé par le plus pur des hasards. Aucune logique ici, sauf celle de la violence tous azimuts.

Voir des citoyens français périr de cette façon nous a dégoûtés et découragés. Ces attentats nous heurtent aussi autrement: ils nous obligent à nous imaginer, nous aussi, en victimes potentielles de cette violence imprévisible. Et cela fait peur. Mais la peur est bien mauvaise conseillère. Elle appelle une réaction sanguine. Ce qu’il nous faut en ces temps décisifs, c’est d’une grande dose de lucidité.

L’erreur que nous commettons depuis que la «guerre au terrorisme» a été déclarée il y a 15 ans, c’est de croire que l’on peut attaquer des pays, des populations – peu importe nos motivations – et que cette violence ne se retournera pas contre nous. La violence a toujours l’effet d’un boomerang.

J’écrivais il y a quelques semaines: «Nous sommes en guerre.» Je parlais de l’intervention militaire canadienne en Irak et en Syrie. Nous sommes bel et bien en guerre, sans jamais que cette décision n’ait fait l’objet d’un vigoureux débat. Nous l’avons laissée passer, cette décision, sans trop y penser. En France aussi, depuis une décennie, on fait la guerre en Libye, au Mali, en Syrie.

Finalement, ce sont nos dirigeants qui mènent ces conflits armés, ce sont eux qui en ont décidé. Sauf que ces combats sont menés en notre nom, au nom de nos valeurs, de notre sécurité ou de notre moralité. Pourtant, on en discute si peu: dans les médias, entre nous. On ne sait pas toujours pourquoi ils sont menés, ni contre qui, ni comment ils pourraient vraiment être utiles. Souvent, nous n’avons même pas conscience que nous sommes en guerre. Jusqu’à ce que la violence crève notre bulle de sécurité.

La guerre n’est jamais bonne ou juste. Elle a parfois été nécessaire dans l’histoire humaine. Rarement. Ces temps-ci nous recourons à l’intervention militaire avec désinvolture. C’est donc aussi l’échec de nos systèmes politiques, de nos sociétés; nous posons le geste le plus grave sans y penser à deux fois.

Lorsque des dirigeants prennent une posture de «fermeté» en réaction aux attentats, ils surfent sur le sentiment de peur que nous avons ressenti au lieu de nous élever collectivement au-dessus de nos instincts belliqueux, vengeurs.

Répondre par la violence n’est pas notre seule option.

Il m’arrive souvent, ces derniers temps, de me projeter dans 30 ou 40 ans, d’essayer d’imaginer à quoi ressemblera le monde au milieu de ce siècle. Dans des moments comme celui-ci, je nous vois tous collectivement effarés de vivre dans un état de guerre perpétuelle, sous la chape de plomb d’une peur permanente, regrettant d’avoir fait des mauvais choix à de moments cruciaux, des choix qui nous ont embourbés dans un cycle infernal de violence. Puis, je me ravise et m’accroche à cette possibilité que nous choisissions plutôt une voie qui nous mènera véritablement là où nous voulons: vivre en paix.

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