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Le producteur de Millénium nous raconte la création de la trilogie

Nous sommes à quelques jours de Noël et de l’arrivée en salle au Québec de Millénium 2 – La fille qui rêvait d’un bidon d’essence et d’une alumette,
film réalisé par Daniel Alfredson et mettant en vedette Noomi Rapace et
Michael Nykvist. Pour mieux comprendre comment les trois films de la
trilogie inspirée des romans de Stieg Larsson ont vu le jour,
Lebuzz.info a interviewé, en direct de Stockholm, le producteur des
films chez Yellow Bird Pictures, Sören Staermose.

Il est un peu plus de 14 heures, heure de Stockholm, lorsque nous
rejoignons Sören Staermose qui, bien qu’il soit en congé pour le temps
des fêtes, a accepté de bon gré de nous accorder une entrevue à la
veille de l’arrivée en salle du deuxième volet de la trilogie Millénium
(notre dossier).
La première question s’impose d’elle même: comment la maison de
production Yellow Bird en est-elle venue à faire l’acquisition des
droits d’adaptation cinématographique pour la trilogie de Stieg Larsson?

«Au début de 2005, peu de temps après le décès de Stieg Larsson,
nous avons eu l’occasion de lire les manuscrits des livres avant qu’ils
ne soient publiés, que Yellow Bird a eu un premier contact avec
l’éditeur, Norstedts Publishing, à Stockholm» explique Sören Staermose.

L’auteur, Stieg Larsson, est décédé subitement d’une crise cardiaque,
le 9 novembre 2004, à l’âge de 50 ans. «Évidemment, nous n’étions pas
les seuls qui avons pu découvrir ces nouveaux et passionnants
personnages dans l’univers des romans policiers, poursuit-il, car il y
avait d’autres producteurs de films et d’autres chaînes de télévision
en Suède qui avaient eu vent de l’information à propos de l’éditeur. On
était donc en compétition. Nous avons négocié, et cela a duré très
longtemps avant d’en arriver à une entente définitive. Nous sommes
arrivés à une entente préliminaire en 2005, en août je crois, et nous
avons signé l’entente définitive en 2006.»

Une expertise reconnue
S’il est évident que l’éditeur a dû prendre en considération les
conditions monétaires de l’entente, il ne fait aucun doute dans
l’esprit de Sören Staermose que l’expertise de Yellow Bird dans la
production d’adaptation de romans policiers, tant pour le cinéma que la
télévision, a aussi eu du poids dans la décision finale.

«Nous avons eu
les droits parce que nous venions de tourner une adaptation basée sur
des romans d’Henning Mankell, la série Wallander, précise-t-il. On
venait de tourner 13 épisodes de 90 minutes, une combinaison de
long-métrages et de séries télévisées, et ils savaient que l’on avait
de l’expérience et aussi qu’Henning Mankell, l’auteur, était très
satisfait des adaptations. Ils ont aussi décidé que l’on devrait avoir
les droits parce que l’on avait de l’expérience avec les adaptations et
que l’on avait aussi une bonne expérience en financement international,
européen. On pouvait donc monter un bon projet. Vous savez, il est
difficile de financer des films en Suède. C’est un petit pays quand
vous désirez produire de grandes séries, de grandes productions de
qualité.»

Rappelons que pendant la période de négociation, les romans ont
commencé à paraître (voir en fin d’article les titres et dates de
parution), recevant un accueil chaleureux tant de la critique que du
public. Yellow Bird a donc immédiatement débuté les préparatifs devant
mener à la production. «Nous avons débuté le développement en 2006 et
il s’est poursuivi pendant toute l’année 2007, se remémore le
producteur. Nous avons débuté le tournage le 26 février 2008. De la fin
février à la fin juin, nous avons tourné le premier film. Nous avons
ensuite pris une pause pour une partie de l’été puis, à partir du 16
août, nous avons enchaîné le tournage des adaptations du deuxième et du
troisième roman avec un même réalisateur. Pour les trois films, nous
avons eu deux réalisateurs: le premier a été réalisé par Niels Arden
Oplev, un réalisateur danois, tandis que le deuxième et le troisième
ont été tournés par Daniel Alfredson, un réalisateur suédois.»

On peut se demander pourquoi il y a eu changement de réalisateur
après la complétion du premier film. Y a-t-il eu bisbille entre le
réalisateur ou le producteur, ou encore entre le réalisateur et les
acteurs? La raison du changement est beaucoup plus simple, comme nous
l’explique Sören Staermose. «Au départ, j’ai demandé à Niels Arden
Oplev de réaliser les adaptations des trois livres, mais il est Danois,
et on tournait en Suède. Il a une famille, quatre enfants, et de rester
à l’extérieur aussi longtemps, ça devient très compliqué. L’autre
facteur qui est entré en ligne de compte est que si vous être un
réalisateur qui veut être très impliqué dans la post-production – le
montage, la musique, les effets visuels -, à ce moment, on ne peut pas
avoir de continuité pour le tournage, puisqu’il ne pourrait pas être
impliqué dans la post-production si l’on voulait poursuivre. C’était
l’autre facteur qui est entré en ligne de compte.»

Le public en redemande!
On peut être porté à croire que le projet de production était de
réaliser trois longs-métrages, mais en fait il en est tout autrement,
comme nous le précise le producteur. «Le projet initial était que le
premier livre était réalisé en long-métrage, de même qu’en deux
épisodes de 90 minutes. C’était le plan dès le départ. Pour le deuxième
et le troisième livre, le plan était de réaliser pour chacun deux
épisodes de 90 minutes, mais pas de long-métrage.» Toutefois, au début
de 2009, devant le succès phénoménal du premier film, et des livres,
Yellow Bird a approché son principal partenaire, SVT – la chaîne de
télévision suédoise – afin d’en arriver à une entente pour la
réalisation de deux autres longs-métrages, ce que SVT a accepté. «Ils
ont vite réalisé qu’il y avait une forte demande de la part du public,
précise le producteur. En plus, les industries du cinéma et de la
télévision sont très proches l’une de l’autre en Suède, et ces
productions ont généré beaucoup d’emploi et de retombées pour tout le
monde.»

Quand on connaît les budgets de productions hollywoodiens, le budget
global prévu pour la réalisation du long-métrage et des six épisodes de
90 minutes a de quoi faire sourire: 14,5 millions $US pour l’ensemble
de la production. Comme le souligne Sören Staermose, le budget final a
été légèrement supérieur. «Le budget a été un peu plus que ça, environ
13 millions d’euros (18,6 millions $US approx.), parce qu’une fois le
tournage complété pour le deuxième et le troisième livre, nous avons
décidé qu’il y aurait des long-métrages de réalisés pour les deux,
alors il y a eu du tournage additionnel qui a été fait, sans oublier le
travail de post-production pour nous assurer qu’au final, nous avions
des longs-métrages de qualité.»

Le phénomène Millénium est vraiment cela: un phénomène. D’une part,
les romans de Stieg Larsson ont non seulement connu un succès
international qui n’a pas encore atteint son apogée (le dernier roman
n’est pas encore paru aux États-Unis), ce qui a soulevé l’intérêt des
lecteurs pour d’autres auteurs scandinaves, dont Henning Mankell,
Helene Tursten et Anne Holt, pour ne nommer que ceux-là. D’autre part,
c’est l’occasion pour le public de nombreux pays de découvrir la
qualité des productions suédoises, essentiellement méconnues à
l’étranger à l’exception de l’oeuvre d’Ingmar Bergman. En développant
une formule de financement originale, Yellow Bird a réussi à briser des
barrières économiques qui, jusqu’à tout récemment, n’auraient pas
permis la réalisation d’une trilogie telle que Millénium. Ce n’est pas
pour rien que Sören Staermose a été honoré lors du Festival du film de
Séville, en novembre dernier, soulignant par le fait même l’impact du
modèle d’affaires qui fait que Yellow Bird Pictures est en voie d’être
reconnu partout à travers le monde.

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