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Suzie Bouchard: le droit à l’humour 

Suzie Bouchard livre son premier spectacle d'une heure dans le cadre du Zoofest. Photo: Gracieuseté Zoofest

Quand Suzie Bouchard nous répond au téléphone, elle vouvoie avec politesse son interlocutrice. Ça semble anodin, mais c’est plutôt rare en humour, un milieu où les familiarités sont fréquentes. En droit, par contre, c’est la norme. Comme quoi ses années comme avocate ne sont pas si loin derrière! 

Trois ans après avoir retiré sa toge pour se lancer dans l’écriture, Suzie Bouchard commence à s’affirmer comme humoriste, assez pour présenter un spectacle au Zoofest.  

«C’est devenu concret quand j’ai fait Le prochain stand-up. On dirait que ça m’a débarrassée du syndrome de l’imposteur et que je me suis dit qu’il y a peut-être une place pour moi en humour», commente-t-elle en avouant être encore à moitié convaincue.  

De l’évolution des milieux 

Il faut dire que l’humour et le droit ne sont pas des domaines où l’on a traditionnellement laissé une grande place aux femmes. Suzie Bouchard en est consciente, mais elle est aussi consciente de ses privilèges. «Ce sont deux milieux qui ont beaucoup évolué dans les dernières années, croit-elle. Je suis arrivée à un moment qui fait que je suis plus chanceuse que la génération avant moi.» 

Je me dis que plus il y aura des femmes en humour, plus il y aura une pluralité de voix de femmes et donc il n’existera pas juste un humour féminin qui est monolithique. Mais ça ne s’arrête pas là, parce qu’il manque encore beaucoup d’autres formes de diversité.

Suzie Bouchard

N’empêche que les deux milieux n’ont pas grand-chose en commun, même si Suzie Bouchard les fait cohabiter dans son spectacle. Les activités de team building d’un cabinet d’avocats, c’est de l’excellent matériel comique!  

Changement de carrière 

La transition ne s’est donc pas faite du jour au lendemain. Depuis 2016, l’artiste de 34 ans est une joueuse dans la Ligue nationale d’improvisation (LNI). «J’ai eu comme une épiphanie: l’écriture correspondait à ce que j’aimais le plus dans l’impro, plus que le jeu», explique-t-elle.  

C’est comme ça qu’elle s’est mise à écrire pour La soirée est (encore) jeudi, où elle était aussi chroniqueuse, mais également pour le Bye Bye ou encore Le Bal Mammouth. Mais c’est une soirée d’open mic pour les non initié.e.s qui lui a donné la piqûre du stand-up.  

«Je me dis qu’il y a peut-être un public pour ce que je fais et c’est très encourageant, surtout en début de carrière», s’enthousiasme Suzie Bouchard.   

Un humour générationnel et «engagé» 

Il y a certainement un public pour Suzie Bouchard. En parlant de son célibat, de ses ruptures, de la séduction hétérosexuelle ou encore de cette tendance que les femmes ont de protéger les hommes de la honte, son discours résonne nécessairement chez d’autres trentenaires… surtout si elles sont féministes et privilégiées, mais pas que. 

La plupart des gars de mon âge que je côtoie, ce n’est pas la caricature que je décris. Mais c’est le fun, parce que ça les fait souvent réfléchir, même si ce ne sont pas des gars qui ont nécessairement besoin de se sentir dominants. Pour moi, c’est déjà un pari réussi! 

Suzie Bouchard

S’il est galvaudé de parler «d’humour engagé», il y a de toute évidence un souci pour les enjeux sociaux dans ce qu’elle écrit, que ce soit pour ses numéros d’humour ou en fiction, comme avec Le temps des framboises.  

«Si je choisis de parler d’un sujet, je veux me commettre, et je pense que dès qu’on se commet, ça devient engagé d’une façon ou d’une autre», analyse l’autrice, qui est en même temps consciente qu’elle navigue sur une fine ligne.  

C’est que l’humour relationnel a été le pain et le beurre des humoristes – surtout des hommes – des années 1990. «Je ne veux pas tomber dans les stéréotypes, et il y en a souvent en humour, même quand tu essaies de bien faire les choses et d’en parler intelligemment, admet Suzie Bouchard. Je n’y échappe pas: dans mon numéro sur comment protéger les hommes de la honte, il y a des stéréotypes et des généralités.» 

Mais peut-être qu’une fois de temps en temps, on peut se permettre quelques généralités pour montrer le revers de la médaille trop longtemps ignoré.  

Suzie Bouchard au Zoofest 
En spectacle du 24 au 26 juillet, à La Balustrade du Monument-National 
Site web 

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