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Un spectacle de 12 heures pour célébrer l’œuvre de Tremblay

Une partie de l’imposante distribution du spectacle « La traversée du siècle ». Centrée au premier plan, la dramaturge Alice Ronfard, qui a écrit l’odyssée à partir de l’œuvre de Michel Tremblay, est entourée de ses « anges dramaturgiques », Dany Boudreault, Emmanuel Schwartz et Alex Bergeron. Photo: Maryse Boyce

Tout partait d’un rêve formulé par la dramaturge Alice Ronfard : voir l’odyssée qu’elle a écrite à partir de romans et de pièces de Michel Tremblay être présentée dans plus d’un théâtre montréalais. Son vœu se voit finalement exaucé. Sept théâtres présenteront La traversée du siècle, un spectacle de 12 heures, au cours de la saison 2023-2024.  

Il s’agit là d’un événement sans précédent : jamais autant de théâtres montréalais ne s’étaient fédérés autour d’une œuvre commune. 

Le Centre du Théâtre d’Aujourd’hui, Duceppe, l’Espace libre, La Licorne, le Théâtre du Nouveau Monde, le Quat’Sous et le Rideau Vert présenteront chacun une seule représentation de ce spectacle, qui avait d’abord fait l’objet d’une mise en lecture à l’Espace libre en août dernier, avant de prendre la forme d’une série balado diffusée sur la plateforme Ohdio de Radio-Canada. 

Image de la série balado La traversée du siècle. Photo : Jérémie Battaglia et Dominique Besner

Épopée de 12 heures 

La traversée du siècle constitue un véritable événement. Plus d’une vingtaine de comédien.ne.s donneront vie à la mythologie québécoise qu’a créée Michel Tremblay, « le plus contemporain de nos doyens », illustre en entrevue avec Métro le comédien Emmanuel Schwartz, membre de l’imposante distribution et l’un des « anges dramaturgiques » d’Alice Ronfard aux côtés d’Alex Bergeron et de Dany Boudreault

L’équipe de création a fait le pari — « risqué », souligne Emmanuel — de la longueur. « C’est une expérience sportive sur scène, fait remarquer la comédienne Rachel Graton à Métro. Ça prend du souffle, on ne peut pas avoir une tenue relâchée, même si on ne donne pas la réplique. » 

Le spectacle se décline en six actes, eux-mêmes scindés en quelques scènes, entrecoupées de pauses. « Le but, c’est ce que soit comme un voyage », illustre l’interprète qui a découvert les Chroniques du Plateau-Mont-Royal au secondaire. 

« C’était comme si je tombais dans un monde aussi fascinant que Le seigneur des anneaux ou Harry Potter. J’ai compris l’ampleur de la portée dramaturgique des personnages, à quel point [Michel Tremblay] est capable d’aller au fond d’eux, de leur vie, de leur enfance jusqu’à leurs pires cauchemars de vie adulte », relate Rachel, qui incarne la matriarche Victoire et sa petite-fille Thérèse.  

Emmanuel Schwartz se souvient de l’écoute assidue du public lors de la lecture effectuée l’été passé. « Il n’y avait pas un son », affirme-t-il en pesant chaque mot. « Parfois des rires ou des souffles d’émotions, des reniflements, des larmes. À la mort de Victoire, on était tous brisés, tant sur scène que dans la salle; on était en eau. C’était un moment d’exception dans une vie d’interprète. C’est un privilège de le retrouver. » 

De gauche à droite, les représentant.e.s des théâtres unis dans l’aventure La traversée du siècle : Sylvain Bélanger (codirecteur général et directeur artistique du Centre du Théâtre d’Aujourd’hui), Alice Ronfard (mise en scène, adaptation et dramaturgie), Félix-Antoine Boutin (directeur artistique et codirecteur général d’Espace Libre), Céline Marcotte (directrice générale du Théâtre du Rideau Vert), Jean-Simon Traversy (codirecteur artistique de Duceppe), Lorraine Pintal (directrice artistique et générale du Théâtre du Nouveau Monde) et France Villeneuve (codirectrice générale et directrice administrative du Théâtre de Quat’Sous). Ne manque qu’un.e représentant.e du théâtre La Licorne. Photo : Maryse Boyce

La traversée de Montréal 

C’est avec émotions qu’Alice Ronfard s’est adressée aux médias et à ses pairs du milieu théâtral, lundi, relatant ce projet qu’elle a imaginé de concert avec son regretté ami André Brassard, qui s’est éteint l’automne dernier.  

La metteuse en scène souligne la transmission au cœur de ce projet « utopique », le défunt metteur en scène ayant « déposé » ce projet en elle, cette dernière s’étant ensuite investie de la mission de transmettre la parole de l’auteur culte au public. Cette passation culmine aujourd’hui avec l’union des théâtres de la métropole.  

« Si les personnages de Michel Tremblay traversent le 20e siècle, le spectacle, lui, traversera les théâtres et Montréal, se réjouit-elle. On est une courroie entre Tremblay et le public. » 

« On se sent proche des acteurs, des mots. C’est une expérience unique entre spectateurs et acteurs », abonde dans son sens le tout nouveau directeur artistique et codirecteur général d’Espace libre, Félix-Antoine Boutin

« Je n’ai jamais vécu une expérience de ce genre, une connexion à la filiation », renchérit le codirecteur général et directeur artistique du Centre du Théâtre d’Aujourd’hui, Sylvain Bélanger, soulignant que le spectacle crée « une multitude d’attaches avec les jeunes générations », le propos de Tremblay étant résolument moderne. 

Sa fresque québécoise avant-gardiste, écrite depuis les années 1960, aborde en effet des thèmes précurseurs qui résonnent comme jamais au 21e siècle, tels que le métissage, les identités de genre, l’homosexualité, la place des femmes, la soif d’émancipation et l’oppression sociale. 

Tremblay, transcendant

Au-delà des représentations, du jeu, c’est « le souffle, la grandeur des histoires » de Tremblay qui transcendent le projet, estime Emmanuel Schwartz.  

Le comédien avoue que l’équipe a traversé bien des aléas liés au financement et la création d’un spectacle d’une telle envergure. 

« C’est un spectacle presque à garde-fou parce qu’on a un texte en main. On a appris des bouts par cœur pour créer des moments scéniques d’une autre force, mais il y a cette rivière souterraine qu’est ce texte, que le public voit. L’auteur est toujours, je pense, à l’avant-plan. »

De la Floride où il passe une partie de sa vie, Michel Tremblay lui-même convie le public à venir « pleurer avec [lui] » devant cette création aussi allégorique que tragique. 

Dates des représentations

Centre du Théâtre d’Aujourd’hui : 26 août 2023 
Théâtre Espace Libre : 2 septembre 2023 
Théâtre La Licorne : 20 avril 2024 
Théâtre de Quat’Sous : 25 mai 2024 
Théâtre du Rideau Vert : 8 juin 2024 
Duceppe : 15 juin 2024 
Théâtre du Nouveau Monde : 29 juin 2024 

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