«District 31», le bel imprévu de Michel Charette
La fin de District 31 constitue un deuil, certes, mais Michel Charette n’avait ni le temps ni l’envie de s’apitoyer sur son sort lors du dernier jour de tournage, il y a un mois presque jour pour jour, le 25 mars.
L’équipe avait alors 34 pages de textes à interpréter en cette seule ultime journée. Une rencontre avec les médias était prévue à l’heure du dîner, après quoi les comédiens devaient encore mettre en boîte une dizaine de scènes, jusqu’à 18h. On a souvent parlé du rythme de production effréné de District 31; la machine aura été bien huilée jusqu’au dernier «Coupez!»
«C’est important d’être là, d’être concentré jusqu’à la fin», a glissé Michel Charette en entrevue, rappelant toutefois que cette cadence de travail soutenue ne lui était pas inconnue, lui qui avait cinq années de 30 vies derrière la cravate au moment de devenir le sensible Bruno Gagné.
Changement de plan
Ses Jean-Lou de Radio Enfer, Léopold des Boys, Benjamin de Watatatow, Samuel de Chambres en ville et autres Ladies Night avaient bien sûr fait de Michel Charette une vedette dans le passé, mais l’acteur a littéralement vu sa carrière exploser avec District 31 – tant aux yeux du public que de l’industrie artistique – et être décorée de trois trophées Gémeaux.
Depuis, s’est ajouté à son agenda un éventail de mandats excitants: la comédie Le bonheur, à TVA (qui reviendra pour une deuxième saison en janvier 2023); la mise en scène de la pièce L’Institut – qu’il cosigne avec son vieil ami François Chénier – au Théâtre des Hirondelles de Saint-Mathieu-de-Beloeil pendant la saison chaude qui s’amorcera bientôt; la reprise de la pièce Le vrai monde?, en tournée ici puis programmée pour quelques représentations en Europe, ainsi que Copilote pour l’été, l’émission quotidienne qu’il coanimera en fin d’après-midi avec sa grande amie Jessica Barker, en semaine, sur les ondes de Rouge FM, à compter du 20 juin. D’ici deux ou trois ans, l’homme promènera même son propre one man show, produit par ComediHa!
Et dire qu’à l’origine, Bruno Gagné ne devait même pas rester dans District 31 à long terme…
«Luc [Dionne, l’auteur] voulait qu’aucun.e comédien.ne de 30 vies ne reste dans District 31. C’est Fabienne [Larouche] et Michel [Trudeau], les producteurs, qui ont insisté, en disant que j’étais un rassembleur, que j’étais bien préparé, que je travaillais bien… Ils ont tellement insisté que Luc a fini par accepter. Au début, le personnage s’appelait Bruno Gauvin et, en cours de route, est devenu Bruno Gagné. Le reste fait partie de l’histoire. Bruno aurait pu simplement venir régler l’histoire de l’enlèvement du petit Théo Gagnon [la toute première intrigue d’enquête de District 31, NDLR] en début de saison, et repartir. Mais je suis resté, j’ai développé une chimie avec le personnage de Vincent [Guillaume Otis, alias Patrick Bissonnette]…»
«Je n’aurais jamais pu avoir un meilleur personnage que ça. Il y avait tellement de viande autour de l’os! Il n’y a pas une journée où je me suis levé en me disant que ç’allait être plate de tourner District 31. Bruno a tellement vécu d’affaires…»
«Et on arrête au bon moment, a ajouté Michel Charette. On est au sommet. Les gens sont encore attachés à nous, nous aiment, ont de l’affection pour nous. La boucle se boucle de belle façon.»
Privilégié
Michel Charette ne tient rien pour acquis. Il s’amuse comme un petit fou dans son métier et savoure chaque seconde des contrats qui le font vibrer, en gardant les deux pieds sur terre. Il sait trop bien que la gloire et la réussite ont parfois un caractère éphémère. D’où l’importance, maintient-il, de diversifier ses terrains de jeux.
«Ça peut finir demain matin. Je suis conscient de ça depuis le premier jour de ma carrière. Il n’y a jamais rien d’acquis. Je suis toujours la dernière affaire que j’ai faite. On est au Québec, et le star-système n’existe pas. Dès qu’on pense avoir percé, c’est toujours à recommencer. Il faut constamment refaire nos preuves. Même après 30 ans de carrière, les gens peuvent nous signifier qu’ils nous ont assez vus et qu’ils préfèrent quelqu’un d’autre. Mais je suis content, car je fais beaucoup de choses: de la télé, du cinéma, du stand-up, des galas… Il faut répartir nos projets.»
«En ce moment, je suis privilégié. Ça marche, tout va bien. Je touche du bois…»