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Trop d’argent dans le béton

C’est à l’aide de son fonds d’immobilisation que l’UQAM a construit cette catastrophe d’Îlot Voyageur (photo) et l’Université de Sherbrooke son beau campus tout neuf, mais sous-utilisé à Longueuil. Photo: archives Métro

La présidente de la Fédération des étudiants universitaires du Québec (FEUQ), Martine Desjardins, a choqué les universités en déclarant qu’elles ont fabriqué le déficit de leur fonds de fonctionnement afin de convaincre le gouvernement d’augmenter les frais de scolarité.

Le fonds de fonctionnement sert aux universités à payer leurs dépenses courantes : salaires des professeurs, services de la vie étudiante, administration, entretien, etc. Aux dernières nouvelles, ce fonds, pour l’ensemble de nos universités, serait déficitaire de 2,1 G$. C’est cette réalité qui fait évidemment dire aux recteurs qu’il faut augmenter les frais afin, non seulement, d’éponger ce déficit, mais aussi de redonner aux universités les moyens de se développer.

Pas si vite, dit Mme Desjardins. Ce déficit est en grande partie attribuable à de nombreux transferts d’argent du fonds de fonctionnement au fonds d’immobilisation. Ce dernier sert à construire de nouveaux bâtiments. C’est à l’aide de son fonds d’immobilisation que l’UQAM a construit le catastrophique Îlot Voyageur et l’Université de Sherbrooke son beau campus tout neuf, mais sous-utilisé, à Longueuil.

Les universités expliquent qu’au cours des dernières années, elles ont connu une augmentation importante du nombre d’étudiants, ce qui a nécessité la construction de nouveaux locaux. Comme elles ne recevaient plus rien du provincial pour les immobilisations, elles n’ont eu d’autre choix que de piger dans leur fonds de fonctionnement. Ce dernier est donc devenu déficitaire.

Martine Desjardins exagère probablement lorsqu’elle dit que les universités ont fabriqué de faux déficits. Mais elle a raison de questionner la sagesse de leurs décisions immobilières. Les recteurs se comportent parfois comme des promoteurs plutôt que comme des éducateurs. C’est à qui aura le plus beau campus et attirera le plus d’étudiants. Or, comme c’est toujours avec l’argent du public qu’ils se font la concurrence, ne serait-il pas plus sage de coordonner leurs activités pour assurer une utilisation optimale des fonds que nous leur confions? A-t-on vraiment besoin de construire des campus satellites pour attirer les étudiants qui auraient pu fréquenter un établissement voisin?

En ce moment, chaque université est subventionnée en fonction du nombre d’étudiants. Plus il y en a d’inscrits, plus la subvention reçue du gouvernement est importante. Cela les encourage évidemment à étendre leur offre de formation dans les régions avoisinantes. Les étudiants ont ainsi accès à un plus grand éventail de programmes, mais est-ce au détriment de leur portefeuille? N’est-il pas temps, au contraire, de rationaliser l’offre des programmes afin d’en réduire les coûts?

Une chose est sûre : cette croissance tout en béton de nos universités ne pourra continuer pour toujours. Démographiquement, leur clientèle traditionnelle, les 20 à 29 ans, diminue. Et les clientèles qui viendront prendre la place (adultes, nouveaux venus, etc.) voudront des formations offertes chez eux, grâce à Internet, plutôt que d’avoir à se rendre sur un campus. À quoi donc servira tout ce béton, alors?

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