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Repenser les villes pour y vivre en santé

Staff - PasseportSanté.net

Choisir où l’on vit n’a rien d’anodin. Ce choix a des conséquences sur notre santé, selon des experts qui ont discuté d’écosanté lors du récent congrès de l’Association francophone pour le savoir (ACFAS), tenu à Québec la semaine dernière.

L’écosanté est un nouveau concept qui intègre deux pôles : l’écologie et la santé. Pour plusieurs experts, c’est concevoir la ville et la banlieue en fonction de la santé, celle de ses habitants comme celle de l’environnement. Ils ont d’ailleurs mis l’accent sur deux aspects de l’écosanté très reliés : les moyens de transport et le lieu où l’on réside.

«Les déplacements augmentent plus vite que la population, souligne d’entrée de jeu Louis Drouin, médecin spécialiste en santé publique et responsable du secteur Environnement urbain et santé à l’Agence de la santé et des services sociaux de Montréal. «Il y a eu environ 40 000 véhicules de plus par année dans la région métropolitaine au cours des cinq dernières années», ajoute-t-il, rappelant du même souffle que l’utilisation du transport en commun a diminué de 7 % de 1987 à 2003.

Des effets directs sur la santé
«L’accroissement du trafic routier fait augmenter les accidents de la route et les maladies cardiorespiratoires à cause de la pollution de l’air. Les transports motorisés diminuent la mobilité active, avec des conséquences sur l’obésité. Ils augmentent les gaz à effet de serre et le bruit», affirme Louis Drouin.

Les îlots de chaleur – des secteurs urbains où la température est plus élevée qu’ailleurs durant l’été – se concentrent dans certains quartiers où la superficie des espaces verts a diminué de 18 % de 1998 à 2005. Et les surfaces boisées deviennent des stationnements, des routes et des centres commerciaux, déplore-t-il.

Condamnant la norme rarement remise en question du développement urbain centré sur l’automobile depuis les 50 dernières années, Louis Drouin demande un moratoire sur la Loi sur l’aménagement et l’urbanisme. Afin de diminuer le nombre de véhicules sur la route, il demande la création de transports en commun «ponctuels, sécuritaires, accessibles, rapides, avec voies réservées, comme à Paris et à Strasbourg».

«C’est le temps de redensifier les quartiers pour localiser les destinations courantes à distance de marche», affirme Louis Drouin. Il suggère de profiter du fait qu’il faudra renouveler les infrastructures vieillissantes pour repenser la ville et la banlieue.

Le quartier Bois-Francs : des résultats décevants
La réussite d’un quartier dense qui favorise les déplacements actifs (bicyclette et marche) et le transport collectif n’est pas si simple, rapporte l’architecte Carole Després, professeure à l’Université Laval et cofondatrice du Groupe interdisciplinaire de recherche sur les banlieues. Le quartier Bois-Francs, dans l’arrondissement de Saint-Laurent, conçu selon ces règles du nouvel urbanisme, l’illustre bien. Ses 6 000 habitants jouissent d’un accès facile à une piste cyclable, au métro, au train de banlieue et aux autobus. Un grand parc occupe 20 % de la superficie du quartier, dont la densité est de 33 logements par hectare.

Même si ce quartier est reconnu par l’organisme américain Congress for the New Urbanism, les résultats ne sont pas roses, concède Carole Després. «On aurait aimé dire que les résidants du quartier Bois-Francs marchent plus et qu’ils prennent moins la voiture que ceux du reste de l’arron­dissement, mais c’est le contraire.» Pire encore, ils battent la moyenne d’utilisation de la voiture des résidants de la région métropolitaine en ce qui concerne les déplacements pour les loisirs et l’éducation.

Comment expliquer ces résultats? La gestion du temps, se risque-t-elle. «Peut-être qu’on a un enfant qui fait du ping-pong-études sur une rive et qu’on a un parent malade dont on doit prendre soin sur l’autre rive, ou qu’on vient de changer d’emploi et que le bureau se trouve plus loin…

Il y a une panoplie de raisons qui font que les gens vivent maintenant non pas à l’échelle du quartier, mais à l’échelle de la métropole.» Les concepts du nouvel urbanisme sont, selon elle, «fondés sur une espèce de nostalgie du quartier d’autrefois où l’on marchait pour aller à l’école. Les comportements des gens, aujourd’hui, sont plus complexes.»

Ce n’est pas mieux en banlieue
La transformation de la banlieue est nécessaire pour une meilleure santé, selon l’urbaniste Gérard Beaudet, directeur de l’Institut d’urbanisme de l’Université de Montréal. «Plus de la moitié des Américains vivent aujour-d’hui en banlieue, rapporte-t-il. Or, c’est l’une des sociétés parmi les pays développés qui présentent les plus importants problèmes de santé. Donc, on voit bien que la banlieue n’a pas été cette solution miracle à laquelle tout le monde a cru pendant longtemps.»

On cherche des solutions non seulement pour la qualité de vie et les problèmes de mobilité des gens, mais aussi pour la santé, poursuit Gérard Beaudet. «Plusieurs indicateurs montrent que si vivre dans un quartier pauvre n’est pas un avantage, vivre dans des quartiers plus riches n’est pas nécessairement la solution ultime», soutient-il.

 

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