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Une église, 10 ans de travail

Photo: Rayside Labossière


Les églises de notre patrimoine moderne n’ont pas la cote au Québec.

De Jonquière à Saint-Jean-sur-Richelieu, plusieurs sont menacées par les pics des démolisseurs, d’abord parce qu’elles ne servent plus comme lieux de culte et ensuite en raison de nombreuses lacunes d’entretien.

À Montréal, on est passé à un cheveu de voir disparaître une œuvre de l’architecte Gérard Notebaert, l’église Sainte-Germaine-Cousin de Pointe-aux-Trembles. Un lieu de culte pourtant considéré par le gouvernement du Québec comme une des œuvres les plus «représentatives du renouveau architectural des églises» entrepris à la fin des années 1950.
Pendant presque 10 ans, architectes, citoyens et organismes ont planché sur sa conversion, en plus de tenir des séances de design participatif pour redévelopper l’ensemble du site. Sans oublier, bien sûr, la lourde tâche d’élaborer un montage financier totalisant près de 40M$.

Résultat: un centre de la petite enfance et une salle communautaire viennent de naître à l’intérieur de l’église, alors que plus d’une centaine de personnes âgées ont pu élire domicile, quelques mois auparavant, dans de nouveaux logements abordables juxtaposés à l’édifice religieux.

«Même l’archevêché voulait détruire l’église, m’a récemment confié l’architecte Ron Rayside, de la firme Rayside Labossière, qui a piloté le projet. Une demande de démolition a déjà été déposée à la Ville, en 2005, en raison de la forte présence d’amiante dans l’édifice.»

Le Conseil du patrimoine de Montréal avait alors refusé cette demande, tout comme le comité consultatif d’urbanisme (CCU) du secteur, reprochant à la paroisse de ne pas avoir fait les efforts nécessaires pour trouver une solution de rechange à la démolition. On ne peut que se réjouir aujourd’hui de cette décision, voyant l’église renaître après des années de travail acharné d’acteurs communautaires et de l’Atelier d’histoire de la Pointe-aux-Trembles.

«Le nouveau bâtiment est en forme de “s” et vient épouser l’église, explique l’architecte. […] C’était une façon de maximiser le site sans cacher l’église, pour qu’on puisse bien la voir de la rue Notre-Dame, un axe de circulation important dans le quartier.»

Le résultat est convaincant, mais surtout inspirant pour le secteur de l’architecture sociale au Québec. Le mariage harmonieux entre le vieux et le neuf apporte une identité forte au site, sans pour autant le dénaturer. L’ondulation du nouvel édifice rappelle le mouvement du fleuve, situé à proximité, tout comme les panneaux bleutés éparpillés sur la nouvelle construction.

Difficile également de demander mieux sur le plan de l’acceptabilité sociale du projet, grâce à tout le travail réalisé en aval avec la communauté. «J’avoue que 10 ans pour réaliser un tel projet [dont 7 bénévolement], c’est long, poursuit M. Rayside. Cinq ou six ans, c’est plus normal. Mais on y est finalement arrivés!»

Comme quoi la solution facile, la démolition, n’est pas toujours l’option la plus sensée pour rendre hommage à notre mémoire collective.

À propos de Gérard Notebaert
Né en 1927, l’architecte Gérard Notebaert a entamé ses études en architecture à Montréal, avant de compléter une maîtrise à l’Université Harvard auprès de Walter Gropius, fondateur du Bauhaus. L’église Sainte-Germaine-Cousin s’inscrit dans ses réalisations les plus significatives, tout comme la cathédrale Christ-Roi de Gaspé, un des rares édifices modernes reconnus à titre de monument historique national par le gouvernement du Québec.

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