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Référendum de 1995: les élus du Plateau se souviennent

Drapeau du Québec Photo: Archives

Le 30 octobre 1995, le Québec a tenu un deuxième référendum sur son indépendance. La date demeure un souvenir indélébile de notre mémoire collective. Si la province a ultimement choisi de demeurer au sein de la fédération, familles, quartiers et communautés se sont déchirés entre les camps du Oui et du Non. Vingt ans plus tard, TC Media a demandé à certains élus montréalais de nous raconter, de leur point de vue, cette journée marquante et de nous parler de l’héritage référendaire.

Amir Khadir se rappelle

Le député de Québec solidaire, Amir Khadir, terminait sa résidence en médecine le soir du 30 octobre 1995. Il a donc travaillé à l’hôpital toute la journée. Il a été voté et a suivi la soirée électorale Amir Khadir (Photo: Isabelle Bergeron)avec sa famille et ses amis à son domicile.

«Dans les semaines précédant le référendum, on a organisé plusieurs débats au sein de la communauté iranienne. Je m’engageais alors au Centre culturel et communautaire iranien», se rappelle-t-il.

Le médecin alors âgé de 34 ans était déjà, à cette époque, un souverainiste convaincu.

«Pour ma famille, le Parti québécois étant un mouvement de jeunes progressistes issus du milieu ouvrier, ça trouvait écho dans nos propres valeurs. De façon générale, nous soutenions le mouvement de décolonisation», se remémore-t-il.

«L’argent et le vote ethnique»
Durant toute la soirée, M. Khadir se «rongeait les ongles intérieurement». L’atmosphère était lourde, tout le monde attendait le résultat.

Puis, l’issue était clair. Le «Non» l’emportait de peu, par à peine 50 000 votes. Vient ensuite le fameux discours de Jacques Parizeau, où il jettait le blâme sur «l’argent et le vote ethnique».

«Il y a eu un débat sur ce que cette phrase signifiait vraiment. Pour ma part, je l’expliquais par la promesse d’argent sous forme de subvention en échange d’un vote pour le non. C’est le clientélisme du multiculturalisme», explique M. Khadir.

Le député de Québec solidaire demeure convaincu, encore aujourd’hui, que Jacques Parizeau croyait en un nationalisme d’ouverture.

«Il aurait fallu s’expliquer dans les jours qui ont suivi. On a manqué de pédagogie. Je crois que le problème, c’est qu’il n’y a pas eu de contre-récit pour cette phrase. Ce sont les fédéralistes qui s’en sont emparés et qui l’ont utilisé comme un instrument de manipulation politique», continue M. Khadir.

Que reste-t-il de 1995?
«Si le mouvement indépendandiste était en meilleure position, on verrait cela d’un œil plus heureux», indique le politicien.

Le résultat de 1995 donne toutefois espoir pour l’avenir, selon lui.

«Ça été une défaite crève-cœur, mais d’un autre côté, quelle formidable victoire morale. Si les choses avaient été faites dans les règles, on aurait gagné avec plus de 50% des voix, alors que l’appui était de 35%, un an avant le référendum. C’est la preuve qu’on peut le faire, en autant qu’on fasse confiance aux gens. Ce ne sont pas les milieux d’affaires qui feront l’indépendance et on n’a pas besoin de leur permission», conclut M. Khadir.

Alexander Norris: le référendum dans une salle de nouvelles

Lors du référendum de 1995, Alexander Norris était journaliste pour le journal The Gazette. Il a donc été au premier rang pour assister au dévoilement du résultat de ce vote historique.

«Il y avait énormément d’émotions durant la soirée. Mes souvenirs, quant à ma couverture journalistique cette journée-là sont très flous, ce ne devait pas être très important. Je me souviens 2010-04-26-11-10-58-4bd5ad0216bf2alex-norris1209JP-2693-PhotoRedukto.jpgsurtout des résultats qui rentraient et du suspense jusqu’à la fin, puisque c’était très serré», se rappelle M. Norris.

Le conseiller de Ville a suivi la soirée de dépouillement des votes à l’intérieur de la salle de rédaction de l’institution journalistique anglophone.

«On savait qu’on assistait à un moment historique. On a vécu un grand moment de démocratie, probablement le plus haut taux de participation jamais vu en Amérique du Nord, alors que plus de 90% des électeurs ont voté (93,52%). Tout le monde était mobilisé», se remémore-t-il.

Et la salle de rédaction, elle? Débattait-elle?

«On savait que chacun avait ses convictions, mais on demeurait professionnel», affirme-t-il.

Manon Massé: le silence

La députée solidaire, Manon Massé, a passé la soirée tranquille, dans son salon, avec sa conjointe de l’époque, lors du dévoilement référendaire.

«Ce dont je me rappelle clairement, c’est l’angoisse. Moi, c’était la première fois que je m’exprimais sur la question», souligne Mme Massé.

Elle avait alors 33 ans et était organisatrice communautaire dans un YMCA. Le souvenir le plus marquant pour la politicienne, c’est le silence dans sa demeure.Manon Massé

«J’avais vu beaucoup de reportages sur 1980. Je savais donc qu’il fallait attendre jusqu’à la toute fin, malgré le fait que le Oui l’emportait presque toute la soirée», se rappelle-t-elle.

Puis, la déception a résonné dans la résidence de Mme Massé, alors que le résultat tombait: le Non avait gagné.

Le discours de M. Parizeau a été reçu de façon mitigée par la députée.

«Lorsqu’il a dit l’argent, j’étais complètement d’accord, mais quand j’ai entendu le vote ethnique, je me suis mise à hurler. Ça a dû profondément blesser les Maria Mourani de ce monde. À ce moment-là, M. Parizeau nous a fait reculer», croit Mme Massé.

Pour la députée, aujourd’hui dans la cinquantaine, ce deuxième référendum témoigne de l’importance d’une assemblée constituante, tel que le propose son parti politique.

«On ne veut jamais perdre un troisième référendum. C’est pour cela qu’il faut une assemblée constituante pour sortir le débat des mains des partis politiques et le mettre entre les mains du peuple», conclut-elle.

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