«Plus rien ne sera pareil» dans les restaurants
Le compte à rebours est lancé pour les restaurateurs de la métropole. Malgré leur enthousiasme, ils savent que ce retour aux fourneaux n’est ni synonyme de retour à la normale ni gage de rentabilité.
Deux mètres. C’est court dans la vie de tous les jours, mais ça peut être très long dans un restaurant.
Pour faire respecter la distance obligatoire entre ses clients, Florence Diep, propriétaire du restaurant Viet Grill dans Tétreaultville, devra condamner la moitié de sa salle à manger.
«J’avais 55 places et là, elles sont réduites à 25. Depuis 12 ans, les soirées, surtout la fin de semaine, c’est toujours plein. Qu’est-ce que je vais faire avec les autres personnes? Si elles doivent attendre dehors, comment je vais réagir?» se questionne la femme d’affaires.
Il faudra changer complètement les manières de faire de la restauration, prévient-elle. «Avant on courait partout. Maintenant, on doit prendre le temps et faire la ligne partout. Au début, c’est difficile, mais un moment donné ça devient une habitude et ça devient le mode de vie qu’on devrait vivre.»
C’est sans compter le port de masque, de gants et de lunettes de protection.
«On est contents de revenir au travail, mais est-ce que tout ne sera plus jamais pareil ?»
— François Audette, restaurateur
Engouement
Néanmoins, les clients semblent impatients de revoir leurs restaurateurs favoris. François Audette, copropriétaire du restaurant Les Canailles, a déjà reçu des demandes de réservations.
L’engouement semble au rendez-vous, mais pour combien de temps?
«Est-ce que la part de revenus des familles destinée aux sorties va être la même?» s’interroge-t-il.
Les gastronomes devront maintenir leur intérêt pour relancer cette industrie fortement ébranlée.
Selon un sondage mené par Restaurants Canada avant les annonces de déconfinement progressif, 10% des établissements au pays ont fermé définitivement leurs portes.
C’est le cas du resto-bar le Maizonneuve, qui a plié l’échine à la mi-mai. N’ayant pas eu le temps d’atteindre le seuil de rentabilité depuis son ouverture, ses propriétaires n’avaient pas les reins assez solides pour survivre à la crise.
Selon François Audette, même avec le déconfinement, les répercussions financières risquent d’être fatales pour certains restaurants, surtout en ajoutant les frais supplémentaires imposés par certaines mesures.
«On sait qu’en restauration, les plans d’affaires sont déjà assez serrés», rappelle-t-il.
La pleine mesure de l’impact économique se constaterait donc à l’automne lorsque les clients se feront plus rares.
Par-dessus tout, François Audette redoute que son travail ne soit plus jamais pareil. Décrivant son restaurant comme «festif» et où les gens sont «collés ensemble», il imagine mal changer d’ambiance.
«On veut faire ce qu’on faisait avant et si on ne peut pas, j’imagine que ça ne sera pas long qu’on va débarquer», se désole-t-il.