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Démocratiser l’art autochtone

Maïté Labrecque-Saganash

Je disais à mon père récemment que la beauté de se réapproprier sa culture, c’est de devenir plus autonome avec celle-ci. Lorsqu’on maîtrise bien certaines choses comme la chasse et l’artisanat, la distance entre soi et son territoire devient moins un problème. J’ai passé une semaine à Gatineau, où les outardes abondaient, et même si je n’ai pas pu aller à la chasse à Waswanipi, je savais que je pouvais aller chasser pas loin. Au fil du temps, j’ai bien appris comment les plumer, les éviscérer et les faire cuire. Lorsqu’on est confiant avec ce savoir-faire, on se sent soudainement moins loin de chez soi, car on le porte partout où on va. Villeray ce n’est pas Eeyou Istchee, mais au moins mon retour n’est pas aussi brutal que je me l’étais imaginé, car je suis maintenant en mesure de m’accommoder dans ma culture. Maintenir un équilibre est beaucoup plus facile, et peut-être qu’un jour je serai un être moins amer et nostalgique. Yé!

Récemment, je suis tombée sur un projet de Galerie Galerie en partenariat avec le Collège Kiuna qui concorde parfaitement avec mes réflexions des derniers temps. L’exposition web Salut l’Internet rassemble 11 étudiants de Kiuna, établissement pensé par et pour les Premières Nations, où chacun a appris les rudiments de Photoshop pour créer une page web. Pour citer Galerie Galerie: «Peut-on considérer l’Internet comme un nouveau territoire? Si oui, à qui appartient-il? Qu’est-ce que la diversité sur le Web?»

Galerie Galerie, c’est une coopérative et une galerie en ligne à l’esthétique un peu vaporwave dont la mission est de démocratiser l’art et d’offrir plus de visibilité aux artistes issus des communautés marginalisées en exposant sur la Toile. Ils ont donc mis sur pied un laboratoire de créations et ont formé les 11 étudiants parce qu’ils utilisent de nouveaux logiciels. Donner l’occasion de se définir à l’aide des moyens contemporains est une mission magnifique.

Les Autochtones sont souvent vus comme des reliques du passé. Nous sommes pourtant de grands consommateurs de culture pop aussi, et Salut l’Internet est un projet visant à «autochtoniser» le web et s’approprier cette plateforme. C’est aussi une occasion pour les étudiants de Kiuna qui sont hors de leur territoire traditionnel de trouver l’équilibre dans ce monde qui jure avec nos traditions. Cette exposition est une invitation des étudiants à vous faire découvrir les êtres contemporains qu’ils sont et à déconstruire les préjugés à notre égard qui règnent aussi sur l’internet. James Luna serait fier d’eux. Dans le cadre de ce mentorat, l’équipe de Galerie Galerie a aussi été invitée à découvrir nos cultures, sous l’aile du valeureux Guy Sioui-Durand. Un dialogue digne du XXIe siècle.

L’exposition Salut l’Internet est en ligne jusqu’au 20 mai sur le site galeriegalerieweb.com­ et regroupe 11 étudiants autochtones du Collège Kiuna qui ont participé au cours Initiation à l’art moderne et contemporain autochtone. L’art autochtone, c’est beaucoup plus que du bois, de l’écorce ou de la pierre. Comme quoi, on s’adapte à n’importe quoi.

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