Tous unis derrière les milieux naturels
La journée mondiale de l’environnement du 5 juin se consacre au thème de la restauration des écosystèmes. Cela sera même le défi de la décennie. Métro s’est donc intéressé à l’importance qu’ont les milieux naturels de la ville de Montréal.
Montréal compte bon nombres de parcs, d’espaces verts et de milieux naturels et ceux-ci ont vu leur fréquentation augmenter avec le contexte sanitaire, les citoyens ont vue ces espaces comme des lieux d’évasion. De plus, ceux-ci font souvent office de cour arrière des citoyens. La mairesse de Montréal estime que «60% des Montréalais n’ont pas de cour».
Les montréalais ne font pas que visiter les parcs mais s’impliquent plus dans leur conservation. L’organisme Les amis du Mont-Royal qui «veille à la conservation et à la protection du Mont-Royal» a pu constater une augmentation du bénévolat en 2019, passant de 726 h à 1 222 h. «L’intérêt pour l’environnement est de plus en plus fort», perçoit le chef du service conservation des Amis de la montagne, Antonin St-Jean.
Un milieu naturel a de nombreux avantages notamment en zone urbaine. «Ces espaces vont jouer un rôle en matière de gestion de l’eau grâce à leurs sols perméables et vont donc soulager le réseau d’égout par exemple, ils vont aussi créer des îlots de fraîcheur. Toutes ces infrastructures « vertes et bleues » offrent des lieux d’évasion en pleine zone urbaine», explique le responsable développement urbain durable du Conseil régional de l’environnement de Montréal (CREMTL), Charles Bergeron.
Un rapport de l’Institut national de Santé publique du Québec (INSPQ) relie même la présence des espaces verts avec une réduction de la mortalité.
«Toutes les trois secondes, le monde perd suffisamment de forêts pour couvrir un terrain de football et, au cours du siècle dernier, nous avons détruit la moitié de nos zones humides. Pas moins de 50 % de nos récifs coralliens ont déjà disparu et jusqu’à 90 % d’entre eux pourraient disparaître d’ici 2050» – Journée mondiale de l’environnement
Il semblerait qu’à Montréal l’on soit chanceux de l’état des milieux naturels d’après le Conseil régional de l’environnement de Montréal. «L’administration en place a démontré son intérêt pour les questions de protection de milieu naturel mais la question c’est toujours de savoir si les moyens vont suivre, c’est la grande inconnue. La volonté politique est exprimée mais les travaux de restauration de milieux humides, de berges, de milieux naturels ou la maîtrise des espèces envahissantes, tout ça c’est assez coûteux», explique Charles Bergeron.
«Chaque année, plusieurs actions de restauration des milieux naturels sont réalisées dans le réseau des grands parcs : enlèvement d’espèces végétales exotiques envahissantes; plantations en milieu forestier pour fermer des sentiers ou boucher des trouées. Ces actions sont planifiées dans l’ensemble du réseau.» – Ville de Montréal
Cependant M. Bergeron note que des améliorations pourraient être réalisées en matière d’expropriation et de collaboration avec les citoyens. «Il y a un travail à faire sur la loi sur l’expropriation qui ne donne pas de leviers aux municipalités pour acquérir des milieux naturels au prix du marché. De plus, un modèle dont on aurait intérêt à privilégier, c’est la collaboration avec les groupes de citoyens qui s’impliquent dans la gestion écologique d’espaces verts comme le Champs des possibles dans le Mile End ou le boisé Jean Milot dans Mercier-Hochelaga-Maisonneuve.»
«Nous saluons l’abnégation de la ville dans le dossier pour la création du paysage humanisé de l’Île-Bizard qui a commencé au début des années 2010. Nous avons bon espoir d’assister à sa création cette année.» – Le Réseau de Milieux Naturels protégés (RMNAT)
Dans son récent Plan nature et sports, la ville de Montréal s’engage à rétablir les écosystèmes et les milieux naturels de ses grands parcs, planter 500 000 arbres et atteindre 25% de canopée entres autres.
Comment se dégradent les milieux naturels ?
Dans le contexte d’une ville comme Montréal, la menace principale d’un milieu naturel, ce sont les espèces exotiques envahissantes. «Montréal n’a pas échappé à l’agrile du frêne (insecte venue d’Asie), il y a quelques années. Énormément d’arbres ont dû être coupés. Il existe aussi des plantes à la croissance agressive comme le nerprun dont on parle moins mais qui est une menace à l’intégrité écologique. Il colonise les sous-bois à peu près partout», souligne le porte-parole du CREMTL.
L’agrile du frêne est un insecte qui se développe sous l’écorce des frênes et y cause des dommages jusqu’au dépérissement de l’arbre. Le nerprun est un arbuste dont la croissance est agressive, ses fruits sont très prisés par les oiseaux ce qui contribue à son expansion géographique.
L’organisme Les amis du Mont-Royal a pu planter plus de 33 000 arbres dans sa mission de reboisement et maîtriser l’expansion du nerprun sur plus de 161 000 m² entre 2006 et 2019.
La dégradation d’un milieu naturel est aussi causée par l’homme. Lorsque des usagers empruntent d’autres passages que le réseau officiel de sentiers, ils peuvent créer des sentiers informels. C’est ce qu’on appelle la fragmentation d’un milieu naturel. La ville doit régulièrement fermer des sentiers indésirables et revégétaliser.
Le parc du Mont-Royal regroupe environ 70 km de sentiers «ce qui est beaucoup pour un parc qui fait 2 km²», concède Antonin St-Jean. «La sensibilisation est complémentaire à notre mission de reboisement, de conservation et de fermeture de sentiers. Il faut responsabiliser les usagers au respect du réseau et surtout informer des conséquences. C’est une bonne chose que les Montréalais se soient réappropriés le Mont-Royal pendant la pandémie mais il faut expliquer que c’est un milieu fragile», précise-t-il.
L’organisme va bientôt mener une campagne de sensibilisation en collaboration avec la ville de Montréal sous forme de kiosques, de panneaux d’affichages mais aussi virtuelle.
Quelles limites aux infrastructures vertes ?
Charles Bergeron note que des efforts sont à faire sur des zones particulières comme les zones industrielles. «Si on veut se doter de zones industrielles résilientes et durables, on devrait penser à y intégrer des infrastructures “vertes et bleues” et pas seulement des zones réservées au développement économique.»
Ces infrastructures pourraient contribuer à la gestion de l’eau ou fournir des îlots de chaleur aux travailleurs, et même faire office de zone tampon entre les quartiers résidentiels et la zone industrielle. «Cela peut jouer le rôle d’écran sonore, visuel et de particule fine», précise M. Bergeron.
Avec la collaboration de François Lemieux.