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La Russie risque d'interférer avec le vote en 2019

Alexander Zemlianichenko / The Associated Press Photo: Alexander Zemlianichenko
Mike Blanchfield, La Presse canadienne - La Presse Canadienne

OTTAWA — Un spécialiste de l’OTAN prévient que la Russie essaiera probablement d’interférer avec les élections canadiennes en 2019 afin de déstabiliser l’alliance militaire, ce qui servirait les intérêts du Kremlin.

Les allégations d’ingérence russe dans l’élection présidentielle américaine de 2016, en plus des tentatives présumées de Moscou de se mêler des scrutins en France, en Allemagne, aux Pays-Bas et en République tchèque, font du Canada une cible tout à fait logique, a estimé en entrevue Janis Sarts, directeur de l’organisme «NATO Strategic Communications Centre of Excellence», établi en Lettonie.

La Russie s’intéresse au Canada car sa déstabilisation «viendrait miner la cohésion» de l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN), et plus encore miner les politiques canadiennes en Europe, a-t-il expliqué.

M. Sarts, qui a témoigné l’an dernier devant le Sénat américain sur l’ingérence russe, a ajouté qu’une interférence dans les élections canadiennes permettrait au président Vladimir Poutine de renforcer sa position chez lui, en démontrant que «les autres pays ont peur de la Russie».

«La démocratie est menacée dès que quelqu’un peut mettre en doute l’intégrité du processus électoral ou ses résultats», résume M. Sarts.

Le gouvernement fédéral a demandé à la ministre des Institutions démocratiques, Karina Gould, de veiller à l’intégrité du scrutin. La porte-parole de Mme Gould, Jordan Owens, a soutenu qu’Ottawa étudie de près comment «nos alliés abordent ces problèmes afin de déterminer quelles solutions seraient appropriées pour le Canada».

«Le gouvernement du Canada continue à surveiller attentivement les menaces étrangères, notamment celles qui pourraient avoir un impact sur les élections de 2019, et travaille avec ardeur pour que les Canadiens conservent toute leur confiance dans nos institutions démocratiques», assure Mme Owens.

La porte-parole précise que le gouvernement canadien souhaite «une plus grande transparence» dans le financement des partis politiques, les collectes de fonds et la publicité électorale. Ottawa aimerait aussi que les géants des médias sociaux «s’attaquent au problème de l’interférence étrangère dans les élections». Le cas américain vient à l’esprit. «(Les entreprises) ont posé certains gestes, mais il faut en faire plus», a soutenu Mme Owens.

Relations déjà tendues

Les relations entre le Canada et la Russie sont actuellement à leur plus bas: le Canada commande un groupement tactique de l’OTAN en Lettonie, dans le cadre du contingent destiné à faire front devant l’annexion par Moscou de la Crimée, en Ukraine, en 2014, et l’instabilité persistante dans l’est de ce pays.

La Russie a aussi menacé le Canada de représailles lorsqu’Ottawa a adopté une loi anticorruption nommée en hommage au lanceur d’alerte russe Sergeï Magnitsky. Le Kremlin interdit aussi à la ministre des Affaires étrangères, Chrystia Freeland, de se rendre en Russie en raison de ses écrits au sujet du président Poutine à l’époque où elle était journaliste.

Mais il existe un secteur où le Canada et la Russie s’entendent mieux qu’auparavant: l’Arctique. Les conservateurs de Stephen Harper n’avaient pas aimé que Moscou plante le drapeau russe au fond des mers du pôle Nord en 2007. Le gouvernement libéral de Justin Trudeau, lui, est d’accord avec le Kremlin pour que cette région fasse l’objet d’une coopération entre les deux pays.

L’ambassade de Russie et Affaires mondiales Canada ont d’ailleurs organisé conjointement une conférence sur l’Arctique, à Ottawa, en novembre 2016. Le gouvernement Trudeau faisait ainsi un geste pour renouer le dialogue avec Moscou dans un secteur où les intérêts sont communs. On est parfaitement conscient, dans les deux capitales, que la fonte des glaces arctiques facilitera le passage des navires, ce qui accroîtra le potentiel d’exploration gazière et pétrolière, mais aussi les menaces à l’environnement et à la sécurité nationale.

Mais selon M. Sarts, cette soi-disant ouverture de Moscou doit être prise avec un grain de sel. «Écoutez ce qu’on raconte sur l’Arctique en Russie même: ils se targuent plutôt que cette région leur appartient. On n’entend pas beaucoup parler de coopération.»

Le «Strategic Communications Centre of Excellence» de l’OTAN a été créé en 2014 pour lutter contre la désinformation russe à la suite de l’annexion de la Crimée. Il s’agit de l’un des trois organismes de recherche de l’OTAN, séparés du commandement militaire, qui luttent contre la guerre électronique russe.

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