Stéphanie Vallée confirme son départ
QUÉBEC — La ministre de la Justice, Stéphanie Vallée, a confirmé mercredi qu’elle quitterait la vie politique à la fin de son mandat, le 1er octobre, comme l’avait révélé La Presse canadienne.
Mme Vallée, qui souhaitait reporter l’annonce à plus tard, a dû changer ses plans et convoquer les médias en catastrophe pour faire le point sur son avenir.
En conférence de presse, elle a dit renoncer à la vie politique en toute sérénité, sans amertume, essentiellement pour se rapprocher de sa famille.
«J’ai envie d’avoir une vie privée, d’avoir une vie à moi», a-t-elle commenté.
«J’ai besoin de temps avec mon monde», a ajouté la députée de Gatineau, mère de deux adolescents et conjointe de l’ex-député libéral Roch Cholette.
Il ne faut surtout pas voir dans son départ prochain un désaveu quelconque du gouvernement et de ses politiques, a-t-elle tenu à préciser, insistant pour dire que sa décision avait été mûrement réfléchie et annoncée au premier ministre il y a quelques semaines.
Constamment sur la sellette ces dernières années, la ministre de la Justice a dû composer avec la gestion des longs délais dans l’administration de la justice, à la suite de l’arrêt Jordan, et surtout l’adoption laborieuse du controversé projet de loi 62 sur la prestation et la réception de services publics à visage découvert.
Mais elle assure que le fait d’avoir été constamment au coeur de la controverse, avec «des vents de face», n’a pas influencé sa décision.
Elle avoue que c’était «difficile parfois sur le plan humain, mais ce n’est pas l’élément qui a pesé dans la décision», a-t-elle dit, admettant tout de même que «faire de la politique, c’est vivre avec de la controverse».
Mme Vallée avait dû aussi, le printemps dernier, composer avec une fronde dans sa propre circonscription de l’Outaouais. Des libéraux mécontents de son travail de députée menaçaient de lui opposer un autre candidat à l’investiture libérale dans Gatineau aux prochaines élections, elle qui représente la circonscription depuis 2007.
Pour l’avenir et la suite des choses, cette avocate de formation soutient ne pas avoir de plans de carrière précis.
Le premier ministre Philippe Couillard a commenté son choix en rappelant que la vie des élus pouvait être «très dure», «surtout pour les femmes».
La vie politique entraîne d’énormes sacrifices, a-t-il fait valoir lors d’une mêlée de presse.
Le ministre de l’Éducation, Sébastien Proulx, lui-même père de deux jeunes enfants, a profité de l’occasion pour relancer le débat sur la difficulté pour les élus de concilier travail et famille. «Ça use, cette vie-là», a-t-il laissé tomber.
Ministres en réflexion
Selon les informations obtenues de plusieurs sources, au moins trois autres ministres sont en réflexion, hésitant entre le oui et le non devant la perspective de réclamer un mandat additionnel à leurs électeurs: Jean-Marc Fournier (Saint-Laurent), Laurent Lessard (Lotbinière-Frontenac) et Geoffrey Kelley (Jacques-Cartier). La ministre Lise Thériault a hésité elle aussi, ayant connu son lot de difficultés, d’abord à la Sécurité publique, puis à la Condition féminine, mais elle a décidé de plonger une fois de plus.
Dans les rangs libéraux, même si ce n’est pas encore officiel, on tient pour acquis que le président de l’Assemblée nationale, Jacques Chagnon, député depuis 1985, ne portera pas les couleurs du PLQ dans Westmount-Saint-Louis lors de la prochaine campagne électorale, libérant ainsi cette forteresse libérale, éventuellement pour la ministre Hélène David. Députée d’Outremont depuis 2014, cette dernière doit se trouver une nouvelle piste d’atterrissage à Montréal, en raison du redécoupage de la carte électorale, qui résulte en une fusion de son fief avec celui du ministre Pierre Arcand, dans Mont-Royal.
Parmi les 69 députés qui forment le caucus libéral, quatre ont déjà annoncé officiellement qu’ils ne solliciteraient pas un autre mandat : Guy Hardy (Saint-François), Karine Vallières (Richmond), Pierre Reid (Orford) et André Drolet (Jean-Lesage). Un cinquième a annoncé son départ à l’interne, mais n’a pas encore rendu la nouvelle publique: Norbert Morin (Côte-du-Sud). On tient aussi pour acquis, dans les rangs libéraux, que Ghislain Bolduc (Mégantic) sera du nombre de ceux qui quittent.
Trois autres députés libéraux poursuivent leur réflexion et pourraient bien annoncer sous peu qu’ils prendront leur retraite de la politique au terme du présent mandat : Raymond Bernier (Montmorency), Michel Matte (Portneuf) et Germain Chevarie (Îles-de-la-Madeleine). Serge Simard (Dubuc) a réfléchi, hésité, mais vient de décider qu’il plongerait à nouveau.
Cas problèmes
Il existe par ailleurs quelques cas problèmes, dont celui de Guy Ouellette (Chomedey), qui a affiché son intention d’être candidat, même si des accusations pourraient éventuellement être portées contre lui en pleine campagne électorale, plaçant le PLQ dans une position inconfortable. Soupçonné d’être à l’origine de fuites dans les médias reliées à une enquête policière, M. Ouellette avait été arrêté par l’UPAC en octobre dernier, mais n’a fait l’objet d’aucune accusation jusqu’à maintenant. Des sources émanant du caucus indiquent que sa situation crée un embarras certain au sein des troupes.
Le cas de Brome-Missisquoi, fief de l’ex-ministre Pierre Paradis depuis 1980, est encore plus délicat. Ce dernier, chassé du conseil des ministres et du caucus libéral à la suite d’allégations d’inconduite sexuelle, est en congé de maladie depuis plus d’un an. Il n’a jamais exprimé ses intentions pour l’avenir, sauf pour signifier par personne interposée qu’il aimerait revenir dans le caucus et reprendre ses activités. Mais chose certaine, même s’il a été blanchi, le député devenu indépendant qui aura 68 ans en juillet ne fait plus partie des plans des libéraux.
Même constat dans Laurier-Dorion, la circonscription de l’ex-député libéral devenu indépendant à la suite d’allégations d’inconduite sexuelle, Gerry Sklavounos. Le PLQ croit avoir déjà trouvé, toujours dans la communauté grecque, celui qui pourrait garder ce comté montréalais dans le giron libéral. M. Sklavounos a bien tenté ces derniers mois de revenir au bercail, mais en vain.
En Mauricie, une région très convoitée par la CAQ, convaincue de ses chances de faire bonne figure le 1er octobre, le député libéral Pierre Giguère (Saint-Maurice) a été forcé de tirer sa révérence, en raison du redécoupage de la carte électorale et de la fusion entre Saint-Maurice et Laviolette, représentée par la ministre Julie Boulet. Entre les deux, le premier ministre Philippe Couillard a dû trancher et a choisi de favoriser la réélection de Julie Boulet.