Pitbulls: Québec bafoue sa promesse
QUÉBEC — Le gouvernement Couillard bafoue sa promesse d’interdire la présence de pitbulls au Québec.
Le ministre de la Sécurité publique, Martin Coiteux, a confirmé mercredi que le gouvernement renonçait à faire adopter le projet de loi 128, tel que déposé l’an dernier, qui prévoyait, à terme, l’interdiction de posséder un chien dangereux, nommément un pitbull.
C’était devenu un secret de Polichinelle que le gouvernement avait mis de côté ce projet de loi, compte tenu que son étude n’avait toujours pas débuté plus d’un an après son dépôt et quelques semaines à peine avant la fin des travaux parlementaires.
En point de presse, le ministre Coiteux a reconnu que le gouvernement avait fait volte-face, faute de consensus sur le sort à réserver à certaines races de chiens jugés dangereux.
Les témoignages entendus en commission parlementaire l’ont convaincu d’une chose: il n’y a pas de consensus scientifique qui permette de désigner des races de chiens dangereux.
Or, une loi «doit être basée sur des faits objectifs», a-t-il fait valoir, reconnaissant que, dans ce contexte, son projet de loi, tel que rédigé, aurait été difficile à appliquer.
En avril 2017, au moment de déposer son projet de loi, M. Coiteux affirmait pourtant que le pitbull était «un chien dangereux qui pose un risque important pour la population».
Le volet du projet de loi 128 qui suscitait le plus de controverses était donc celui qui identifiait les catégories de chiens potentiellement dangereux, nommément les pitbulls, les rottweilers, les terriers américains et les bulls terriers du Staffordshire.
M. Coiteux espère tout de même faire adopter son projet de loi avant la fin de la session, le 15 juin, en l’amputant de tous ses irritants qui ne faisaient pas consensus dans la population et auprès des experts, la désignation de races de chiens nommément.
Il s’est défendu de se rabattre sur un projet de loi édenté, en réaffirmant son intention de légiférer pour assurer un encadrement serré des chiens potentiellement dangereux pour la population, «pas des règles bonbons».
Le principe du projet de loi a été adopté mardi. L’étude article par article peut donc commencer. Mais il ne reste que quelques jours et le gouvernement devra compter sur l’adhésion inconditionnelle des partis d’opposition s’il veut vraiment le faire adopter.
Selon M. Coiteux, il y a «de très bonnes chances» que le projet de loi soit adopté à temps.
Le leader parlementaire de l’opposition officielle, Pascal Bérubé, a soutenu que le gouvernement multipliait les pressions sur les partis d’opposition en vue d’obtenir leur «collaboration» pour faire adopter ses projets de loi à toute vapeur.
«Ça commence à faire beaucoup», a-t-il commenté, en mêlée de presse.
Le projet de loi 128 avait été rédigé à la suite de la tragédie qui a frappé Christiane Vadnais, cette Montréalaise attaquée et mordue à mort par un pitbull en juin 2016.
Le projet de loi 128 n’incluait pas comme telle l’interdiction de posséder un pitbull, mais une fois la loi adoptée, le ministre Coiteux s’était engagé à faire passer un décret gouvernemental qui irait en ce sens.
À terme, la possession d’un pitbull aurait donc été interdite et les chiens jugés dangereux auraient dû obligatoirement être signalés aux autorités.
Les propriétaires actuels d’un pitbull auraient pu cependant conserver leur compagnon.
Durant la consultation, de nombreux intervenants, notamment les vétérinaires, étaient venus faire valoir que la loi n’était pas applicable. Le milieu municipal s’objectait aussi à voir Québec identifier des races de chiens prohibées.