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Élections fédérales: le Parti vert germe-t-il dans le coeur des progressistes?

La chef du Parti vert du Canada, Elizabeth May
La chef du Parti vert du Canada, Elizabeth May Photo: Cole Burston/La Presse canadienne

Alors que de nombreux jeunes marchent dans les rues du monde entier pour dénoncer l’urgence climatique, la vague Gretha Thunberg risque-t-elle de gagner le cœur des électeurs en faveur du Parti vert du Canada ?

Les jeunes pas impressionnés

Marouane Joundi du mouvement étudiant québécois «La planète s’invite à l’Université», ne voit pas un engouement particulier envers le Parti vert du Canada au sein de son groupe, rappelant qu’il constitue un mouvement non partisan. Même si certains partis politiques se rapprochent de leurs valeurs, Marouane Joundi croit que les jeunes «demandent vraiment beaucoup plus que ce qui est proposé».

«Du jugement général qui ressort, c’est jamais suffisant et on n’est jamais pleinement en phase avec leurs demandes. La justice sociale, la justice internationale, les enjeux intersectionnels et la justice climatique ne sont pas assez présents dans leurs plateformes, ça commence à peine à émerger», estime le porte-parole de «La planète s’invite à l’Université».

M.Joundi remarque que les étudiants du mouvement ont une crainte de récupération politique de la lutte climatique par les partis. «Il y a beaucoup de gens dans le mouvement qui parlent de ce qui c’est passé en 2012 où le PQ s’était approprié le grève étudiante. […] on n’est pas dupe», renchérit-il.

Un parti progressiste ?

Quoiqu’il est souvent présenté comme un parti de gauche, le politologue et spécialiste en communication politique de l’Université de Laval Thierry Giasson, rappelle que le Parti vert est plutôt centriste. « Les Partis verts à travers le monde ne se sont pas toujours placés à gauche de l’échiquier politique. Ce sont souvent des partis centristes, qui défendent un créneau progressiste social avec une certaine forme de rigueur économique », explique-t-il.

Au regard de son programme électoral et les positions du parti politique, M. Giasson doute des valeurs progressistes du Parti vert du Canada. Selon lui, le slogan du parti politique, « Cette élection est la plus importante de l’histoire du Canada » , n’est ni à gauche ni à droite et ne démontrerait clairement pas les aspirations du Parti vert.

« Madame May dit à la fois que son parti est à gauche parce qu’il adhère à la valeur de la justice sociale, mais en même temps c’est un parti qui encourage, et défend le fait de vivre selon ses moyens économiquement et écologiquement et cela le placerait davantage vers la droite […] c’est un peu délicat parce qu’ils se placent eux-mêmes en porte-à-faux avec les progressistes qui eux sont plutôt de l’obédience que le gouvernement est parfaitement dans son droit d’investir dans l’économie, de la stimuler, de développer des programmes sociaux même si ça mène à des déficits » ajoute-t-il.

M.Giasson note que le Parti vert n’a pas de discours clair contre l’exportation pétrolière et semble davantage la favoriser lorsqu’il met de l’avant un discours stipulant qu’il faut vivre selon nos moyens écologiquement. « Ça donne des munitions au NPD qui a un discours très clair sur l’exploitation pétrolière », ajoute-t-il.

La semaine dernière, la porte-parole du Parti vert du Canada, Elizabeth May a refusé d’interdire à ses candidats de se prononcer contre l’avortement stipulant que ce n’était pas en lien avec les valeurs de son parti de contrôler les pensées de ses candidats. Selon M.Giasson, cette approche est typique du Parti vert qui croit moins à la hiérarchie. Il estime toutefois que son indulgence sur les enjeux aussi importants que l’avortement n’aide pas la porte-parole et ses candidats à gagner le cœur des progressistes.

« Pour gagner les votes des progressistes, il va falloir que le Parti vert fasse la démonstration que c’est un parti progressiste, alors qu’il veut incarner des valeurs de gauche et de droite. » Thierry Giasson, politologue de l’Université de Laval

Pour la politologue Ruth Dassonneville, qui étudie les comportements électoraux, le Parti vert ne représente pas «l’anti-establishment» qui est mis de l’avant par certains politiciens de gauche. Bien qu’il prétende vouloir faire de la politique autrement et ne pas avoir de hiérarchie dans son leadership, Madame Dassonneville croit que le Parti vert reste un « un parti qui suit certaines règles pour jouer le jeu politique ».

Le chroniqueur autochtone Robert Jago croit que le Parti vert constitue une forme de progressisme démodé et plutôt blanc. « Si les lois sur les droits des minorités, des autochtones, des immigrants, les réformes sur la justice pénale passent derrière l’environnement et ne sont que des questions secondaires, je trouve ça très problématique » confie-t-il à Métro.

Le Montréalais estime que leurs politiques ne prennent pas en compte les réalités autochtones. À la suite d’articles publiés sur le sujet, il soutient que plusieurs candidats verts ont été hostiles et condescendants envers lui et d’autres militants autochtones, « C’est comme s’ils avaient la conviction que nous devrions nous aligner avec eux parce que l’environnement est primordial et nos inquiétudes seraient secondaires, et que nous devrions les remercier de nous remarquer. »

Une vague verte ?

Ruth Dassonneville présume que le Parti pourrait certainement profiter du climat actuel pour gagner des votes. À l’Île-du-Prince-Édouard, le Parti vert constitue l’opposition officielle. Il a trois sièges provinciaux au Nouveau-Brunswick, un siège en Ontario et a remporté l’élection partielle fédérale en Colombie-Britannique. La politologue ne présage toutefois pas de gains de sièges pour le parti au Québec. « Pour ce faire il faut vraiment que leurs votes soient concentrés dans quelques circonscriptions seulement et ça reste improbable », juge-t-elle.

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