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Les 6 mythes de l'immigration

S’il y a un sujet qui a fait couler beaucoup d’encre au cours de la dernière année, c’est bien celui de l’immigration. Tous les points de vue ont proféré, les pour comme les contre, en plus, des mythes. Ceux-ci donnent souvent une image péjorative de l’immigration. Avec des experts de la question, Métro a tenté d’en démystifier quelques-uns.

1. «C’est facile d’immigrer.»

Immigrer signifie quitter sa patrie pour s’établir dans un pays a priori étranger. C’est une expérience déchirante, selon l’avocat Julius Grey, qui a quitté sa Pologne natale à l’âge de neuf ans avec sa famille pour s’exiler au Canada. «Les gens ne savent pas à quel point les premières années sont difficiles, dit-il. [Il faut] une grande capacité d’ajustement».

Même son de cloche du conseiller de ville, Marcel Tremblay, qui est responsable des questions concernant les communautés culturelles au comité exécutif de la Ville de Montréal. «On leur dit : « Viens-t-en à Montréal, tu vas être capable de survivre ». Ils viennent avec un rêve américain qui tourne rapidement au cauchemar», soutient celui dont la conjointe a immigré au Canada. Souvent mal préparés à leur venue dans un autre pays, ils tentent de s’en sortir comme ils le peuvent, a constaté à de nombreuses reprises M. Tremblay.

2. «Les immigrants volent nos jobs.»

C’est sans doute le mythe le plus répandu, souligne le professeur de sociologie de l’Université du Québec à Montréal (UQAM), Rachad Antonius. Selon lui, les nouveaux arrivants ont un effet très positif sur la croissance économique, même si, à leur arrivée, ils ont besoin d’aide.

«Ce qui diminue le nombre de jobs, ce n’est pas le fait que des gens immigrent ici, c’est que les jobs migrent vers des pays dont l’économie est émergente, comme la Chine par exemple», rectifie M. Antonius.

Julius Grey est du même avis, arguant que ce mythe de «voleur de job» n’est qu’une «obsession amère et revancharde». «Les emplois ne sont pas limités en nombre et les immigrants créent des emplois, souligne-t-il. Dans mon bureau, il y a dix employés.»

3. «Les immigrants sont incapables de s’intégrer à leur société d’accueil.»

À maintes reprises, lors de la Commission Bouchard-Taylor, la capacité d’intégration des nouveaux arrivants a été décriée. L’histoire démontre que ce même discours a été émis il y a un siècle lors de l’arrivée des Irlandais aux États-Unis, rapporte le professeur Antonius. «On avait tellement peur de la non-intégration des Irlandais qu’on les considérait comme des Afro-Américains, relate-t-il. Ils ont commencé à s’intégrer et  ils sont passés, dans la conscience populaire, de noir à blanc. Et ça, on l’a vu avec toutes les communautés qui étaient un peu différentes.»

Rachad Antonius ajoute que les médias ont tendance à mettre en évidence ce qui choque et étonne, escamotant ainsi les multiples histoires d’immigrants qui se sont parfaitement intégrés.

4. «Les immi­grants restent immigrants à vie.»

Sommes-nous définis en large partie par notre pays d’origine? Est-ce que le concept d’appartenance est figé? Ou est-il assez malléable pour qu’un immigrant cesse d’être considéré comme «l’étranger»? Selon la professeure de l’École de travail social de l’Université du Québec à Montréal, Ginette Berteau, il y a des étapes au processus d’intégration d’un immigrant et, rendu à l’une d’elles, il se sent inclus à la société et il devient un citoyen actif.

«Il y a probablement plusieurs personnes qui ne se sont pas senties assez accueillies pour faire le passage», précise-t-elle en contrepartie. L’âge peut parfois brouiller les cartes, selon l’avocat Julius Grey. «Un adulte va sûrement demeurer un immigrant à vie, mais un enfant non», nuance-t-il.
Si des immigrants ne considèrent pas qu’ils font partie intégrante de leur société d’accueil, c’est qu’ils ont, dans certains cas, l’espoir de retourner dans leur pays d’origine. «C’est pour cela que, parfois, ça prend plus qu’une génération pour d’une famille s’intègre», explique Marcel Tremblay.

5. «On les reçoit. C’est bien assez!»

Près de 28 000 immigrants débarquent chaque année à Montréal. Certains ont préparé leur exil longtemps à l’avance, mais d’autres ont été forcés de quitter leur patrie sur un coup de tête. Il faut les aider à trouver leurs repères, selon le responsable des communautés culturelles à la Ville de Montréal, Marcel Tremblay. «Il faut leur expliquer comment on fonctionne, dit-il. [Par exemple], on peut juste leur montrer où on trouve de la nourriture. C’est aussi simple que cela, mais il faut que quelqu’un leur dise.»

Pour le professeur de l’UQAM, Rachad Antonius, une ouverture des deux côtés est nécessaire. «C’est normal qu’on fasse des accommodements, mentionne-t-il. Le mythe, c’est de penser que ces accommodements sont tellement gros qu’ils vont tout changer.»

D’un autre côté, c’est faux de penser que ces accommodements se feront sans heurts, indique M. Antonius. Des problèmes surviendront, les tensions s’intensifieront, mais ce ne sera pas dramatique, selon lui.

6. «Le Québec est raciste.»

La Belle Province est-elle vraiment raciste ? L’an passé, le Journal de Montréal en a fait douter plus d’un lorsqu’il rapportait dans un sondage Léger Marketing que 59 % des Québécois s’avouaient racistes. Qu’en est-il vraiment? «On soupçonne souvent l’expression du nationalisme québécois être du racisme, ce qui est faux», avance Julius Grey. Selon lui, toute forme de racisme est condamnable, qu’elle vise les différentes communautés culturelles ou les francophones.

Dans cette même ligne de pensée, Marcel Tremblay croit qu’un manque de connaissances qui occasionne souvent des mauvaises perceptions. «Dans une grande ville comme Montréal, il y en a moins de ces difficultés parce qu’il y a beaucoup de communautés culturelles», soutient-il.

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