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Guy Turcotte: La peine connue le 15 janvier

Stéphanie Marin - La Presse Canadienne

SAINT-JÉRÔME, Qc – «Tu m’as brisé à jamais le coeur», a lancé vendredi Isabelle Gaston à son ex-conjoint Guy Turcotte lors de l’audience de détermination de sa peine, après qu’il eut été reconnu coupable du meurtre de leurs deux jeunes enfants.

L’homme saura le 15 janvier prochain le nombre d’années minimum qu’il devra passer derrière les barreaux avant d’être admissible à une libération conditionnelle.

Après la matinée de représentations des avocats sur la peine qui lui sera imposée, le juge André Vincent, de la Cour supérieure, a fait savoir qu’il rendra un jugement écrit à cette date.

L’ex-cardiologue de 43 ans a été reconnu coupable le 6 décembre dernier par un jury du meurtre non prémédité de ses deux enfants, au terme de son deuxième procès.

Ce verdict entraîne automatiquement une peine de prison à vie.

Les représentations des procureurs vendredi avaient trait au nombre d’années que Guy Turcotte devra passer en prison avant d’être admissible à une libération conditionnelle, soit entre 10 et 25 ans.

La Couronne a soutenu que cette période devrait être au minimum de 20 ans, alors que l’avocat de Guy Turcotte a plaidé qu’elle devrait être de moins de 15 ans, «plus près de 10 que de 15», a même précisé Me Pierre Poupart.

Pour la Couronne, il n’y «a aucun facteur atténuant» pouvant justifier une peine plus clémente: l’homme était bien nanti, et bien entouré de sa famille, qui le soutient toujours.

Il a commis un crime brutal, a souligné René Verret, procureur principal de la Couronne. «De plus, l’accusé n’exprime aucun remords, aucun regret par rapport à ce qu’il a fait», a-t-il dit.

Mais selon Me Poupart, son client est le premier à être complètement bouleversé par le drame, justement parce que «c’est lui qui l’a fait». Il a rappelé que Guy Turcotte était, de l’avis de tous, atteint d’une maladie mentale le soir du drame. Et que même si cet argument n’a pas ouvert la voie à un verdict de non-responsabilité criminelle, son état mental doit être considéré lors de l’imposition de la peine. «C’est une personne qui a d’abord et avant tout besoin de soins», a dit l’avocat de la défense.

Guy Turcotte a admis avoir tué Olivier, 5 ans, et Anne-Sophie, 3 ans, le 20 février 2009. Après son premier procès tenu en 2011, il avait été reconnu non criminellement responsable pour cause de troubles mentaux, ce qui avait suscité la colère de la population.

Lors de l’audience de vendredi, Isabelle Gaston a livré un témoignage puissant mais d’une grande tristesse sur ce qu’elle a enduré et la culpabilité avec laquelle elle vit toujours.

Elle a raconté au juge Vincent comment elle a vécu à répétition des flashs d’horreur, ne pouvant cesser de penser au meurtre de ses enfants.

Guy Turcotte est arrivé crispé et menotté dans le box des accusés. Il est détenu depuis le verdict rendu par le jury de 11 personnes. Pendant que son ex-femme s’adressait tantôt au juge, tantôt à lui directement, il pleurait, tentant d’essuyer son nez avec ses mains prises dans les menottes de métal.

L’interpellant directement, Isabelle Gaston lui a dit qu’il a brisé son coeur en lui enlevant ses deux enfants, Olivier et Anne-Sophie.

«Je veux que tu saches Guy Turcotte que tu as atteint ton objectif», lui a-t-elle lancé, pendant qu’il secouait la tête en pleurant.

«Je veux que tu me regardes dans les yeux», a-t-elle dit, dans un moment d’une rare intensité, dans la salle de cour.

«Tu m’as brisé à jamais le coeur, mais je veux que tu saches que tu n’as pas brisé ma résilience», lui a-t-elle dit, pendant que de nombreuses personnes pleuraient dans la salle.

«La femme qui existait en 2009 n’existe plus et n’existera plus jamais», a-t-elle dit, expliquant au juge comment elle avait toujours voulu être mère.

Elle a ainsi relaté comment elle a tenté depuis d’avoir d’autres enfants, toutes les difficiles procédures médicales faites pour réaliser ce rêve. Mais à 43 ans, elle a dit avoir perdu espoir.

Les procureurs de Guy Turcotte n’ont pas présenté de témoins mais ont déposé des mises à jour de rapports psychiatriques et psychologiques de l’homme.

Celui-ci, lorsque invité par le juge Vincent à prendre la parole, a saisi l’occasion.

«Les gens ne peuvent pas comprendre la honte que j’ai, a-t-il dit d’une voix faible. Je ne peux pas regarder les gens en face tellement j’ai honte.»

Il s’est aussi adressé à son ex-femme.

«Je veux te dire Isabelle, je n’ai pas fait le procès pour que tu te sentes responsable», a-t-il ajouté, disant vouloir expliquer ce qu’il a fait et vécu, «après avoir touché le fond du baril».

«Ce n’était pas pour te faire mal», a-t-il ajouté.

«Je sais que je ne me pardonnerai jamais ce qui est arrivé», a dit l’homme, en guise de conclusion, avant de reprendre le chemin de la prison.

Ses avocats n’ont pas encore fait savoir s’ils envisagent un appel du verdict.

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