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Cinéma IMAX: Petite incursion derrière l’écran géant

Photo: Chattanooga CVB/Collaboration spéciale

Chaque année, des producteurs, distributeurs, exploitants de salles et autres personnes gravitant autour de l’industrie du cinéma sur écran géant se rassemblent au congrès de la Giant Screen Cinema Association (GSCA), question notamment de prendre le pouls des projets de films en développement. Métro a accompagné la responsable de la programmation du cinéma IMAX du Centre des sciences de Montréal, Julie La Roche, dans ce grand marché du documentaire 3D qui s’est tenu en septembre dernier à Chattanooga, au Tennessee.

Julie La Roche nage comme un poisson dans l’eau (en 3D, bien sûr) au congrès de la GSCA. Elle œuvre dans le domaine depuis plus de 20 ans, et tout le monde la connaît et se l’arrache.

Elle est ici pour visionner les plus récents documentaires tournés en format IMAX et prendre connaissance des projets en développement afin de sélectionner les prochains films qui prendront l’affiche à Montréal.

Quatre nouveaux documentaires sont diffusés chaque année sur l’écran géant du Vieux-Port. Trois d’entre eux se partagent simultanément l’affiche en jouant en rotation.

Julie La Roche classe ces films en un système qu’elle nomme «A-B-C», «A» étant la nouveauté grand public (actuellement Pandas 3D, voir encadré plus bas), «B» étant l’ancien «A» (Océans 3D, qui était le gros film de l’été) et «C» étant un film «de niche», comme ç’a été le cas jusqu’à tout récemment pour America’s Musical Journey.

Un documentaire peut rester à l’écran jusqu’à un maximum d’un an. «Ça dépend vraiment des types de films, explique-t-elle. Les gens viennent en moyenne deux fois par année. La clientèle du temps des Fêtes n’est pas la même que celle du congé scolaire d’été. Là, je sais que je vais faire mon hiver avec Pandas 3D en “A”.»

Son choix n’est toutefois pas arrêté pour sa prochaine nouveauté, attendue en février. C’est pourquoi Julie La Roche profite du congrès de la GSCA pour dénicher la perle rare. Avec deux documentaires animaliers à l’affiche, la programmatrice est à la recherche d’un film qui plaira aux amateurs d’aventure.

Ça tombe bien, deux d’entre eux sont projetés un à la suite de l’autre dans la salle de Chattanooga en ce vendredi matin. Il s’agit de Mountain Quest et de Volcanoes. Le premier porte sur les amateurs de sports extrêmes qui se pratiquent en montagne, tandis que le second suit sur le terrain une équipe de scientifiques qui étudient comment les volcans ont été essentiels à l’apparition de la vie sur Terre.

Son critère de sélection le plus important est que le film soit pertinent en format 3D. «La première question que je me pose est: “Pourquoi je sortirais de mon salon pour voir un film sur écran géant?” Si je peux voir le même documentaire sur ma télé à la maison, il n’a pas d’intérêt, même s’il est très bon», fait-elle valoir.

Autre condition: que le film corresponde à la mission éducative du cinéma montréalais, tout en étant divertissant. «Il faut apprendre sans trop s’en rendre compte, résume-t-elle. Par exemple, on sait que la planète est en danger, mais rien ne sert de culpabiliser le public. Montrez-nous qu’il y a de l’espoir et que c’est possible de contribuer à améliorer la situation.»

Après le visionnement des deux documentaires, la programmatrice admet faire face à un choix difficile: tous deux sont à la hauteur de ses attentes.

«Maintenant que je sais que le contenu est bon dans les deux cas, je dois penser d’un point de vue commercial. Qu’est-ce qui va vendre le plus? Je suis forcée de penser à ça, parce que les profits d’IMAX servent à financer le Centre des sciences. Est-ce que je devrais aller rejoindre une communauté maniaque de sports extrêmes ou devrais-je me tourner vers la clientèle “National Geographic”, amatrice d’explorations?» se questionne-t-elle.

La décision n’était pas encore prise au moment de notre rencontre, mais Julie La Roche convient qu’il s’agit d’un beau choix. «Peut-être que je vais en choisir un pour l’hiver et garder l’autre pour l’automne 2019, par exemple.»

Une chose est sûre, selon elle: le documentaire portant sur les volcans serait plus facile à vendre d’un point de vue marketing, puisqu’il se résume plus simplement. «Quand c’est un sujet unique, c’est plus facile d’en faire la promotion, dit-elle. Par exemple, pour Pandas 3D, je n’ai pas à me casser la tête: j’ai une image claire, celle d’un panda. Chaque fois qu’on doit expliquer à la billetterie de quoi un film parle, on part avec un désavantage.»

Ainsi, les films de catégorie «C», qui sont considérés comme «de niche», ou hors norme, sont plus risqués à présenter, puisqu’il est moins assuré qu’ils trouveront leur public, contrairement aux films d’animaux, qui ont un succès assuré auprès des familles.

Ces documentaires sont néanmoins essentiels à la programmation du cinéma IMAX de Montréal, qui s’adresse aux «2 à 99 ans», souligne-t-elle.

Certains d’entre eux ont par ailleurs connu de grands succès, notamment Jérusalem 3D, réalisé par le Montréalais Daniel Ferguson, qui a été présenté en 2014. «On avait beaucoup d’appréhensions en raison de la question religieuse et du conflit politique. Finalement, le résultat a été au-delà de nos attentes», cite-t-elle en exemple.

«À l’époque, le slogan d’IMAX était “Be there” (Soyez-y). L’écran géant et le son laser donnent l’impression d’être dans le film. Quand la mouche vole, on la cherche. C’est très immersif comme expérience.» –Julie La Roche

Julie La Roche, programmatrice du cinéma IMAX de Montréal

Films en développement
En plus des marathons de visionnement de films, le congrès de la GSCA à Chattanooga permet à des cinéastes et à des producteurs de présenter aux gens de l’industrie les projets de documentaire sur lesquels ils planchent actuellement, souvent dans le but de trouver du financement ou un distributeur.

C’est l’occasion pour Julie La Roche de penser au long terme. En prenant connaissance des films en cours de production, elle a un bon avant-goût des sujets qui seront traités dans les prochaines années par les documentaristes 3D. Toutefois, ces extraits ne suffisent pas à ce qu’elle s’engage à présenter ces futurs films à Montréal, sauf exception. Ainsi, l’exceptionnelle bande-annonce du film Antartica: A Year of Discovery de BBC Earth a suffi pour la convaincre. «Ce film n’aura aucune difficulté à rejoindre son public», assure-t-elle.

Un autre documentaire en développement portant sur l’antique cité d’Angkor, au Cambodge, a suscité son intérêt. «Le public montréalais est friand de films à saveur touristique», dit celle qui sélectionne les films d’abord en fonction de leur potentiel de réussite et non de ses goûts personnels.

La plupart de ces documentaires ne seront pas terminés avant trois ou quatre ans: la production d’un film en format écran géant est laborieuse, notamment en raison des coûts de production exorbitants et des conditions de tournages souvent extrêmes.

En effet, la mission d’IMAX est d’emmener les spectateurs en des endroits où ils ne peuvent se rendre eux-mêmes, comme l’espace ou les fonds marins, ce qui vient avec un lot de défis techniques et financiers. 

Les pandas arrivent en ville

Nouvellement à l’affiche au cinéma IMAX de Montréal, le documentaire Pandas 3D suit Qian Qian, une petite ourse née en captivité qui tente de faire la transition vers la vie sauvage avec l’aide d’un biologiste. Le film emmène également les spectateurs dans les montagnes de Chengdu, en Chine, où se trouve la plus grande pouponnière de pandas du monde. C’est là que des scientifiques chinois se sont donné la mission de contribuer à l’expansion de la population de pandas à l’état sauvage.

Samedi, les enfants sont invités à aller voir le film déguisés en pandas, question de célébrer l’approche de l’Halloween. La projection sera gratuite pour eux et leur accompagnateur.

Toni Myers, une pionnière

Un prix hommage pour l’ensemble de sa carrière a été remis à la cinéaste torontoise Toni Myers lors du gala annuel de la GSCA, à Chattanooga.

Toni Myers est une pionnière dans l’industrie, y œuvrant depuis ses balbutiements dans les années 1960. Elle est connue pour avoir réalisé plusieurs documentaires sur l’espace, dont The Dream is Alive (1985), Destiny in Space (1994), Space Sation 3D (2002) et A Beautiful Planet (2016).

Ces films ont inspiré des astronautes à exercer leur fascinant métier, comme l’ont démontré leurs touchants témoignages présentés lors de la cérémonie.

«C’est formidable! s’enthousiasme la nouvelle retraitée en entrevue. Ça montre le pouvoir du média», dit celle qui est réputée pour sa grande humilité.

Si ses films ont eu autant d’impact, c’est grâce à la technologie IMAX, selon elle. «C’est un média immersif qui emmène les gens où ils ne peuvent pas aller eux-mêmes. Quel meilleur exemple que l’espace?»

Sa grande expérience a changé sa perception de la Terre. «Quand on a reçu notre premier tournage de l’espace, on n’avait aucune idée de ce à quoi ça ressemblerait! Voir la rondeur de la planète pour la première fois était incroyable, ça nous a coupé le souffle! Ça fait prendre conscience de la fragilité de la planète.»

Notre journaliste séjournait à Chattanooga à l’invitation de la Société du Vieux-Port de Montréal.

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