Pour qui chante Marie-Élaine Thibert en 2022?
Voilà dix ans que Marie-Élaine Thibert n’avait pas proposé d’album de pièces originales. Il y avait bien eu l’opus pour enfants Mes berceuses, en 2013, mais dans la décennie 2010, la chanteuse avait plutôt donné dans la relecture, de Piaf et autres légendes du répertoire francophone.
Depuis, ont émergé sur nos scènes des Charlotte Cardin, des Sarahmée, des Lydia Képinski. Des talents nouveaux, libres d’à peu près tous standards, affranchis dans leurs propos et pas nécessairement à l’aise avec le jeu de promotion des médias de masse.
Marie-Élaine Thibert ne s’en cache même pas, elle les admire et les envie presque.
«Je vois passer les plus jeunes et je trouve le fun que certaines ne se maquillent même pas, glisse Marie-Élaine. Moi, j’aime me maquiller, mettre mes yeux en valeur. Mais j’adore les voir arriver à une émission de télé en jeans et en t-shirt. C’est ça, la vie. On est comme on est…»
L’American Dream…
Sont récemment apparues de nouvelles étoiles au firmament, bref, qui n’ambitionnent pas nécessairement d’accompagner Céline Dion et ses envolées vocales enflammées dans une enceinte de Las Vegas en robe longue, dans des mises en scène tapageuses, fantasme largement véhiculé et moussé dans les premières moutures de Star Académie. Émission, doit-on le rappeler, qui consacrait une timide Marie-Élaine Thibert de 19 ans chouchou du public en 2003.
Ce rêve – cliché pour les uns, ultime consécration pour d’autres –, Marie-Élaine l’affectionne et l’assume totalement, les yeux brillants. Il n’y a rien de mal à l’American Dream, croit-on lire dans son sourire craquant comme celui d’une gamine.
«Moi, c’est mon genre. J’aime ça. Mais j’ai aussi des goûts éclectiques. Sur certains de mes albums, j’ai été un peu plus à gauche… mais on n’entendait pas parler de ces chansons-là! (Rires.) Mais c’est certain que je viens de cette école. Jeune, dans mon sous-sol, j’écoutais Céline, Lara Fabian et Isabelle Boulay, et encore aujourd’hui, j’écoute de la pop grand public. Pour moi, Pierre Lapointe, c’est super pop.»
«Une Charlotte Cardin, il y en a déjà une. Moi, je suis Marie-Élaine Thibert…»
Tout le monde
Au fait, qui est le public de Marie-Élaine, alors que celle-ci s’apprête à souffler ses 40 bougies le 18 avril?
Quelle tranche d’âge en pince le plus pour sa pop adulte, très radiophonique, de surcroît très bien ficelée sur le disque Notre histoire, que l’artiste lançait fin mars? Qu’on aime ou pas la jeune femme et son style, force est d’admettre que sa réinterprétation de C’est le début d’un temps nouveau, entrecoupée d’un slam de David Goudreault, qui tourne en boucle dans sa publicité télévisée, a tout du parfait ver d’oreille. Idem pour le pimpant extrait J’ai confiance, que plusieurs auront instantanément le goût de fredonner à la première écoute.
La réponse, toute simple, tombe comme une évidence.
«Je parle à tout le monde, statue Marie-Élaine. Bien sûr, à ceux qui ont regardé Star Académie. À ceux qui sont très “TVA”. Mais aussi beaucoup d’auditeurs de Radio-Canada. Je jongle avec ça. Monique Giroux est l’une de mes bonnes amies, et elle m’a fait entrer dans le réseau radio-canadien. (Rires.) René Homier-Roy m’invitait souvent à ses émissions. C’est assez large.»
Sortir de ses pantoufles
Son nouveau «bébé» professionnel au son du printemps, Marie-Élaine en est extrêmement fière. Elle le travaille depuis l’ère, lointaine semble-t-il, prépandémique. Déjà, en 2019, elle s’était alliée à Nicolas Lemieux, de GSI Musique, son actuel gérant et producteur, qui l’a encouragée à rappliquer avec du matériel tout neuf. À ajouter un cinquième album original à sa discographie, qui compte maintenant huit titres au total, incluant les compilations de relectures.
Même si.
«Ça fait peur à tout le milieu artistique, de créer du nouveau. C’est beaucoup plus facile de vendre des reprises que les gens connaissent déjà! Et j’aime chanter des reprises, je suis dans mes pantoufles», avance franchement Marie-Élaine
Elle a osé. Les délais ont été «10 fois pires que d’habitude», déplore-t-elle, en raison de la fichue COVID-19. Mais le temps a permis d’accumuler de jolies pépites, pour faire de Notre histoire un produit bien unique, au goût populaire du jour, avec un maître comme Antoine Gratton à la réalisation. Parmi elles, Vous ne m’avez pas crue, un texte de Laurent Paquin sur une musique d’Andrea Lindsay, donnant la parole à une victime d’agression bafouée.
Rattrapage
Marie-Élaine Thibert sera à Star Académie, dimanche, le temps d’un pot-pourri hommage à Céline Dion avec d’autres ex-diplômées de l’école Star Ac.
Elle l’avoue candidement: elle a «du rattrapage» à faire d’ici là. Parce qu’elle n’a pas encore regardé les nouvelles éditions du concours télévisé.
«Je n’écoute pas beaucoup la télévision, en partant. Ce n’est pas que je n’aime pas les académicien.ne.s; quand ils vont sortir des albums, je vais les encourager. Mais je ne prends pas le temps. Et, puisque je suis passée par là, je n’ai pas le goût de voir des jeunes pas sûrs d’eux… Je l’ai vécu. Donc, c’est bizarre de regarder ça, moi-même.»
Or, de ce qu’elle en a vu, elle remarque que le Star Académie 2.0 est plus léché que le précédent.
«Nous, on ne s’attendait tellement pas à tout ça! On était un peu “tout croches”, on ne savait pas comment se tenir sur scène. On était difficiles à gérer! (Rires.)»
L’album Notre histoire, de Marie-Élaine Thibert, est en vente sur le site web de Marie-Élaine Thibert, en format numérique, disque et vinyle.