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Canal Famille, la nostalgie sans lunettes roses 

Simon Portelance (à gauche) et Guy A. St-Cyr (à droite) sont les auteurs du livre «Génération Canal Famille». Photo: Mathieu Portelance

Si vous avez grandi au Québec dans les années 90, Canal Famille évoque probablement de tendres souvenirs. C’est du moins le cas pour Guy A. St-Cyr et Simon Portelance, les auteurs de Génération Canal Famille.  

Le livre, paru cette semaine chez Québec Amérique, est une véritable bible de la chaîne qui a produit 52 émissions jeunesse originales, de 1988 à 2001. S’il évoque bien sûr la nostalgie, il revient sur ces années marquantes avec sincérité, soulevant aussi les failles du poste pour enfants.  

«Ce n’est pas une nostalgie aveugle, précise en effet Simon, qui fait partie du collectif d’humour Les Piles-Poils. Il y a des émissions de Canal Famille qui ont moins bien marché. Même dans les émissions qui ont bien marché, il y avait des points faibles et on est capable de le dire.» 

Retour dans le temps 

Les deux auteurs, qui étaient eux-mêmes enfants à l’époque de Canal Famille, n’avaient pas envie de faire semblant que tout était parfait. Heureusement, la vaste majorité des 250 personnes interviewées pour l’ouvrage étaient sur la même longueur d’onde. 

Ainsi, en parcourant les quelque 350 pages de l’ouvrage, on tombe sur des anecdotes qui en témoignent. Pensons à la distribution de Chat Boume (1989-1991) qui crevait de chaleur dans les costumes, au point où les prothèses décollaient! 

Dans cet esprit de «nostalgie réaliste», les auteurs et leurs intervenant.e.s n’hésitent pas à avouer que toutes les productions n’ont pas connu le même succès que Radio Enfer ou Les intrépides.  

C’est le cas, par exemple, de l’émission plus ou moins oubliée Livrofolie. «C’était une émission littéraire, rappelle Guy A. St-Cyr. Ça peut avoir l’air sec, ça peut avoir l’air très beige… et par bouts, ce l’est. Pour un enfant, c’est un peu trop adulte, mais c’est trop enfantin pour un adulte.» 

Il n’y a pas que des productions qui sont tombées dans les oubliettes. Si Canal Famille a contribué à faire connaître Élyse Marquis, Christian Bégin, Bruno Blanchet ou encore Claude Legault, d’autres personnalités sont passées à autre chose depuis et ont été plus difficiles à retracer.  

Pas étonnant, donc, que Guy et Simon aient passé trois ans à travailler sur le livre. Tels des recherchistes de Deuxième chance, ils ont entre autres su retrouver Liliane Karam de L’Îlot de Lili et Pierrette Boucher de Dis-moi Lou. 

Des artistes enthousiastes 

Très peu de gens ont refusé de participer à Génération Canal Famille. Au contraire, les auteurs du livre ont été accueillis avec enthousiasme par les artistes et artisans de la chaîne.  

«C’était revenir aux sources, à un moment où ils devaient encore prouver qu’ils avaient leur place, croit Simon Portelance. Ça a été une époque vraiment foisonnante pour cette génération de comédiens qui a tout appris sur ces émissions-là.» 

En fait, les personnalités ont été si généreuses que Guy et Simon ont dû choisir de taire certaines des histoires qu’elles leur ont racontées. «Les émissions jeunesse, ça fait aller dans un extrême enfantin. Il faut le relâcher», indique Guy A. St-Cyr. 

Ce n’est rien de scandaleux! Mais quand on est dans des émissions préscolaires, on n’a pas envie de détruire le souvenir que les gens en ont. Avec Radio Enfer ou Dans une galaxie, on peut se permettre des affaires un peu plus salaces. 

Simon Portelance 

Au-delà de ce que les comédien.ne.s pouvaient bien faire avec des marionnettes entre deux prises, les auteurs ont reçu des confidences inédites.  

Par exemple, Bruno Blanchet leur a admis s’être senti inférieur à côté de son collègue du Studio, Guy Jodoin, qui avait déjà de l’expérience comme acteur. «Il s’est confié devant Guy Jodoin, qui n’avait jamais entendu parler de ça, se souvient Simon. Nous, on était là! C’est un moment vraiment fantastique qu’on a eu la chance de vivre.» 

Des entrevues touchantes, il y en a eu pour les deux auteurs. Ça a été le cas avec les comédiens de Pin-Pon, qui leur ont dit être allés visiter à l’hôpital une toute jeune fan malade qui est décédée peu de temps après. «Se faire raconter des histoires comme celle-là, ce n’est pas juste surprenant, c’est aussi bouleversant», avoue Guy A. St-Cyr, qui anime aussi le balado On jase de films.  

Investir en jeunesse 

C’est en changeant de poste pour arriver à Canal Famille que Guy a appris à compter, tandis que Simon a fait des cauchemars récurrents à cause d’Enfanforme. Aujourd’hui, ils sont tous les deux de grands consommateurs de culture québécoise et déplorent le fait que les plus jeunes n’auront pas ce même attachement.  

«Depuis 10 ou 15 ans, il y a eu une grosse drop de production d’émissions jeunesse au Québec. On le voit que les ados n’écoutent pas de productions québécoises et c’est un cercle vicieux», se désole Simon Portelance, qui estime, tout comme son collègue, qu’il faut arriver avec des propositions audacieuses pour les enfants et les ados.  

«Si on délaisse les jeunes culturellement, on ne peut pas aller les récupérer plus tard, croit Guy A. St-Cyr. Il faut qu’on ose des blagues et des thématiques qui peuvent être choquantes pour certains adultes, mais que les jeunes vont apprécier. Et les vedettes qu’ils vont découvrir en tant qu’enfants, ce sont des comédiens qui vont évoluer avec eux et qu’ils vont vouloir suivre, comme nous on a eu Élyse Marquis, Christian Bégin, Claude Legault…» 

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