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Embarques-tu avec Daniel Boucher?

Photo: Denis Beaumont/Métro

«Toutte est temporaire», constate Daniel Boucher dans son quatrième album studio. Une œuvre qu’il a d’ailleurs créée, dit-il, en se permettant «toutte». «La seule loi que je me suis donnée, c’était de faire ce que ça me tentait de faire, au moment où ça me tentait de le faire», précise-t-il. Sur ce microsillon qui marque son retour six ans après Le soleil est sorti, l’auteur-compositeur-interprète règle la question de La langue en mettant en musique un monologue d’Yvon Deschamps, nous laisse entendre des hurlements de loups, fait pleurer sa guitare à Mont-Louis, raconte l’histoire de deux malfrats empotés de Granby, et ajoute une chanson au panthéon des tounes de char avec Embarques-tu? On embarque.

Dans la plupart des chansons qu’on trouve sur Toutte est temporaire, vous posez des questions. Sur À ma place, Mont-Louis, Embarques-tu?, Qu’est-ce qui reste à faire?, Granby. Vous les posez sur différents tons; certaines sont plus profondes, d’autres, plus légères… Sentez-vous que cet album vous a permis de trouver des réponses?
Moi, ce qui me fascine, c’est de voir à quel point t’écris des tounes et que t’as aucun contrôle sur la perception des gens. Ça fait des années que je veux faire un album portatif – c’est-à-dire, avec des tounes qui sont assez courtes, faciles et le fun à jouer – sans me demander c’est quoi la ligne directrice. Je ne l’ai pas fait exprès; [l’album] est arrivé comme ça. Et je ne me suis pas posé tant de questions sur l’architecture de l’affaire!

Est-ce que c’est une chose que vous aimez, découvrir les différentes façons dont les gens ont perçu votre disque?
Ben, j’aime mieux me faire dire: «Ton album est écœurant!!!» que «Arrrk, il est écœurant…»

Il est écœurant, point d’exclamation.
Y’é bon hein? (Rires) Moi aussi, je le trouve bon!

Vous semblez avoir eu beaucoup de plaisir à le faire.
J’ai vraiment, vraiment eu du plaisir. Tsé qu’on a tout fait à deux, hein? [Avec le coréalisateur et batteur Sylvain Clavette.] Au complet! On est entrés en studio au début de janvier. J’avais un paquet de riffs, des thèmes, des couplets, des refrains, des musiques pas de textes, des textes pas de musique… Mais rien de fini. Je me suis fait une petite liste de ce que j’avais envie d’enregistrer, en me disant que ça finirait par déclencher des choses.

Vous ouvrez votre disque avec Histoire de ma vie (Scusez menutte). Une chanson sur laquelle votre voix est hachée, comme si vous preniez votre souffle, et où vous répétez: «S’cusez menutte» un peu comme quand on essaie d’entrer dans une conversation. Est-ce que c’est un peu votre façon de revenir, après toutes ces années d’absence, dans la «discussion musicale»?
Hm… (Rires) Non, je trouvais ça trippant de saccader ça. Un peu comme un beat à la… j’sais pas à la qui, en fait. Mais le «houp»! Tsé, le «houp»? (Il chante:) «Houp! parapara, houp!» J’ai entendu ça quand j’étais petit garçon. Ça m’amusait. Et le «s’cusez menutte», ben, c’est parce que, même si ça n’a pas toujours l’air de ça, je suis une personne qui s’excuse souvent dans la vie. Je trouvais que c’était une bonne idée de commencer le disque avec cette toune-là. Parce que si je ne l’avais pas mise au début, je me demande où je l’aurais [placée]!

Sur Embarques-tu?, vous utilisez un échantillon du [duo du Saguenay formé en 1968] les Karrik. Et on sent dans votre chanson une insouciance, une légèreté, qu’on associe souvent à l’époque des années 1960-1970. Des émotions que vous souhaitiez transmettre?
C’est en entendant [les Karrik] que j’ai eu l’idée de la toune. J’écoutais des vinyles chez nous. Je n’avais pas d’attentes. J’aime ça, faire de l’échantillonnage. Sur [mon album précédent] Le soleil est sorti, je pense qu’il n’y en avait pas pantoute, mais c’est pas grave, j’ai toujours aimé m’amuser avec ça. J’ai «samplé» ce p’tit bout pis en 10 minutes, j’avais un couplet, un refrain et l’essentiel de la mélodie. C’est arrivé comme ça! (claquement de doigts) Des cadeaux de même, c’est le fun.

«Le phrasé, la façon de lier les notes, d’articuler la guitare… j’ai travaillé un peu plus ces aspects-là sur cet album. Je pense que les chansons en soi expriment des choses assez claires. Encore là, je sais qu’il y a des gens qui les reçoivent différemment de ce que moi, je ressentais quand elles sont arrivées. Et c’est correct! C’est correct parce que c’est un disque. C’est pas un manuel de construction qui dit : “OK, mettez deux madriers dans cette position et clouez.”»

Et l’original a un titre extraordinaire: Je n’ai pas de roses pour ta fête.
Heille, Je n’ai pas de roses pour ta fête!!! As-tu déjà entendu la chanson au complet? C’est pas pire, hein? Ça chante, ces gars-là!

Vous avez coécrit une pièce sur ce disque, Granby, [avec Virginie Bilodeau]. Une histoire de bandits qui ont raté leur coup…
C’est cool, hein? Ils sont tellement épais! C’est lui qu’y fallait que tu pognes! Pas sa grand-mère!

C’était un trip, écrire ça?
Oui! Ça ne ressemble tellement pas à ce que je fais d’habitude!

Un autre trip, c’est sur Salon magique, où vous racontez un rêve halluciné que vous avez fait dans le salon d’un certain Dave Duvet. Une chanson inspirée de faits réels…
Tu le savais que c’était inspiré d’un vrai rêve?! Comment ça? Tu connais Dave Duvet?!

Non, mais on connaît tous un Dave Duvet.
C’est vrai. (Rires) Mais ça s’est vraiment passé: à 24 ans, je suis allé coucher chez Dave. Dans ce temps-là, on fumait du pot pas mal… Faque évidemment, j’ai fait un rêve de pot. J’ai rêvé que je rentrais dans un party et que le doorman, c’était un chimpanzé. En habit. Il me serrait la main (il fait mine de serrer une main), pis il me regardait d’même (il nous regarde de même). Le lendemain, j’ai conté ça à mon ami, on a ri et j’ai écrit quelques [paroles]: «J’ai serré la main d’un chimpanzé / dans un salon magique / plancher mou / plafond flou / pis des pianos partout partout». J’ai laissé ça comme ça. Mais moi, je garde tout. J’ai des serviettes de table avec des mélodies écrites dessus, je mets tout dans une boîte, et quand c’est le temps de travailler, je l’ouvre, pis je [fouille]. Des fois, je prends des photos, pis je regarde mes…

… serviettes de table…
Mes serviettes de table, oui. (Rires) À un moment donné, je suis retombé sur ce morceau de Salon magique, et ça m’a donné envie de finir la chanson. Faque je l’ai finie.

Vous avez déjà joué La langue [dans laquelle on entend des extraits du monologue Un an sur le français d’Yvon Deschamps] sur scène, au show de la Saint-Jean; avez-vous hâte de présenter les autres pièces à Coup de cœur francophone?
Oui, j’ai hâte! On va jouer pas mal de nouvelles tounes, mais aussi des vieilles. Ça fait cinq ans qu’on n’a pas joué à Montréal. Y as-tu pensé? Cinq ans!

Ça vous a manqué?
Ouais. On a joué ailleurs beaucoup, mais à Montréal… ça fait cinq ans.

Toutte est temporaire
En vente mardi
À Coup de cœur francophone mercredi à 20h au Club Soda

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