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Cali: «J’aime bien quand ça dérape»

Photo: Yann Orhan\collaboration spéciale
Boris Tampigny - Metronews France

Cali débarque aux FrancoFolies avec L’âge d’or, son album en hommage à Léo Ferré. Un disque sensible, dans lequel il affine sa personnalité d’enfant turbulent de la chanson française.

Depuis l’album précédent, vous évoquez des choses très intimes dans vos chansons. Comment l’analysez-vous?
Ce n’est pas prémédité. Je me rends compte que les chansons sont arrivées à un moment de ma vie où j’étais loin de ma famille. Le manque m’a sûrement fait écrire sur mes mômes et les lieux de mon enfance. Et j’ai aussi appelé l’album L’âge d’or parce que quoi qu’il arrive, malgré les choses difficiles qu’on peut vivre, il nous reste des moments précieux. Je voulais transmettre le message qu’on peut se construire des souvenirs merveilleux à tout âge.

Pourquoi faire ce bilan maintenant?
J’aime bien dire que je vais mourir demain. Pour moi, ce n’est pas négatif, c’est dans la lignée du carpe diem. Il faut vivre les choses à fond, avec les moyens qu’on a. J’ai eu un troisième enfant, on voit les années avancer, et je me dis que ce n’est pas si loin, que c’était le moment d’écrire ça.

À quoi l’«âge d’or» correspond-il pour vous?
Je dis souvent à mes enfants que ce n’était pas forcément mieux avant. Il y aura toujours des moments géniaux et des moments difficiles. Chacun doit construire ses souvenirs comme des refuges. L’album ne verse pas forcément dans la nostalgie, c’est plutôt un hommage que je rends à des personnes que j’ai croisées, comme mon institutrice d’école primaire.

Vos chansons viennent-elles toujours d’un souvenir difficile?
Que ce soit une chanson d’amour ou un morceau politique, j’ai toujours un besoin vital de me faire du bien au cœur ou du mal au ventre, de me faire pleurer tout seul. La vie est absurde, et ces petites bulles incroyables qui arrivent avec des mots dedans me sauvent la vie. Si je pouvais, je ferais des sculptures ou je peindrais des tableaux.

Avez-vous parfois des complexes par rapport à d’autres artistes?
Si on lit trop un écrivain, on se dit qu’il est intouchable. Si j’écoute trop Léo Ferré, je me dis que tout ce qui est magnifique a déjà été écrit. On a tous un tableau à dessiner et un truc à dire, ce n’est pas un championnat, il n’y a pas de meilleur. J’ai croisé récemment le navigateur Arnaud Boissières, j’aimerais beaucoup me lancer moi aussi dans un tour du monde en bateau quand ce sera le bon moment. Je suis admiratif des gens qui ont eu 10 000 vies, comme mon ami Éric Cantona (NDLR: un ancien joueur de soccer français).

Sur la chanson Je dois te dire tout ça, vous abordez la mort avec beaucoup de pudeur…
Si je vais très vite et dans tous les sens, c’est sûrement par peur de la fin. Mes chansons sont une analyse, et il n’y a rien de plus terrifiant que la disparition d’une personne. J’ai une amie à qui on a dit qu’il lui restait quelques jours à vivre, mais les docteurs se sont trompés. Elle m’a raconté qu’elle ne voyait plus les choses de la même manière, après.

Avec le temps, vos albums contiennent toujours plus de fêlures et d’émotions. Comment l’expliquez-vous?
J’ai parfois l’impression qu’on est dans une montgolfière, qu’on prend des photos, et que plus on s’approche du sol, plus les clichés sont précis. Ça me fait un bien fou d’écrire des chansons, ça peut m’arriver d’offrir des cadeaux à tout le monde et de sourire aux gens dans la rue. Je fais ça aussi pour justifier notre existence, que je trouve absurde.

«J’ai besoin d’exorciser des choses. Je ne peux pas écrire une chanson pour rien, il faut qu’elle me remue sur tous les plans.» – Cali

Votre groupe de lycée s’appelait «Pénétration anale» et vos concerts sont assez agités. Êtes-vous un punk dans l’âme?
J’aime le côté performance. Ce qui est génial avec un concert, c’est qu’on construit pendant deux heures quelque chose qu’on détruit après. Pour moi, le punk, c’est les yeux écarquillés de Johnny Rotten, les Ramones ou les Clash, et ça représente l’éternité et la rage. C’est pour ça que j’aime bien un groupe comme Fauve, instantané et frondeur.

Et aujourd’hui?
Même si je suis rentré dans le rang, j’ai toujours un caillou dans la chaussure, j’aime bien quand ça dérape. Et parfois, les gens peuvent avoir peur, il faut que je les rassure. Quand on fait des trucs pour faire marrer ses copains et que ça passe à la télé, comme quand j’avais embrassé un mannequin aux Victoires de la musique, je me dis qu’il faut que je me calme. C’est de la provocation, mais il faut être sur le fil et remuer la vie.

Cali
Au Club Soda
Mercredi à 19h

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