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Kaboum au 2595 rue Masson

Le 2595 rue Masson. L’adresse, peu connue du grand public, l’est du milieu artistique. Depuis plusieurs années, metteurs en scène et producteurs ainsi que leurs acteurs y défilent incognito. Mais depuis quelques semaines, les réguliers du 2595 sont bousculés par de nouveaux visiteurs, plus jeunes et plus bruyants. En effet, des enfants s’y engouffrent à pas de course après avoir vu la vitrine. Ce qu’ils y trouvent, c’est l’atelier fantasmagorique de la costumière Mireille Vachon.

En ces temps où le repos est de rigueur, Mme Vachon l’occupe en partie à préparer son séjour à Beijing et l’autre à travailler dans son atelier. En le parcourant, on y retrouve des mannequins, des machines à coudre et quelques tissus épars sur les tables de travail, des masques et d’autres objets témoignant des univers que Mme Vachon a un jour aidés à créer. Dans la vitrine de son atelier, elle a d’ailleurs installé les habits des superhéros de l’émission jeunesse Kaboum dans le cadre du Parcours M de Promenade Masson.

Selon Mme Vachon, c’est cela qui attire le regard des enfants. « Quand ils arrivent ici, ils montrent les costumes à leurs parents en leur expliquant ce que chaque personnage fait. Ils sont émerveillés par eux. » Généralement, la propriétaire de Créations Mireille Vachon et son assistante gardent la porte du 2595 ouverte durant l’été, mais devant l’achalandage des derniers jours, elles doivent la garder fermée pour pouvoir travailler.

Marquer une génération

Cependant, Mme Vachon dit comprendre la réaction des enfants. Elle se souvient d’avoir été chamboulée la première fois où elle a vu le costume de la Souris verte, de l’émission éponyme, en visitant le quartier général de Radio-Canada à Montréal. « Les personnages de cette émission ont alimenté l’enfance de ma génération, affirme-t-elle. Encore aujourd’hui, je me souviens bien d’eux. Je me trouve vraiment privilégiée qu’on me fasse confiance pour créer des parcelles de la mémoire collective d’une génération. »

Puisque Création Mireilles Vachon vend généralement ses articles à des producteurs privés, elle n’utilise que très rarement sa vitrine pour rejoindre les passants. Elle préfère donc la mettre au service de la promotion de l’art grâce au Parcours M. « Je trouve que cette initiative est fantastique. Si toutes les rues étaient comme ça, nous nous promènerions dans une immense galerie d’art », explique la costumière. En effet, depuis le 5 juin et jusqu’au 28 août, des œuvres d’artistes locaux en arts de la scène sont installés dans les vitrines des commerçants de la rue Masson. Elle invite vivement tous les commerçants à faire pareil.

Pour Mme Vachon, les gens sont de moins en moins directement exposés à l’art. « On est plus vraiment en contact avec les œuvres d’art, surtout depuis l’arrivée d’Internet. On ne se déplace plus pour les voir ou toucher », remarque-t-elle. De plus, elle note que devant le caractère éphémère des expositions, les artistes ont bel et bien besoin de lieux pour promouvoir leurs créations.

Devenir une artiste de l’ombre

Diplomée en théâtre au cégep de Saint-Hyacinthe, Mme Vachon se souvient de la raison qui l’a poussée à choisir de travailler dans l’ombre des projecteurs. « J’étais très manuelle et je dessinais beaucoup quand j’étais jeune. Mais je ne savais pas qu’on pouvait en vivre. C’est en 1979, alors que je me préparais à passer mes auditions pour devenir comédienne, que j’ai entendu parler de la production théâtrale. Pendant mon entrevue, j’ai déballé mon portfolio. Ils m’ont tout de suite accepté, mais ça il ne voulait pas que je le dise », confie-t-elle.

Depuis, la conceptrice de costumes a accumulé plusieurs prix : des Gémeaux en 2009, 2001, 2000 et 1995, des Masques en 2003, 1999, 1996 et 1994, pour ne nommer que ceux-là. Cette année, elle est de nouveau nominée aux Gémeaux pour les costumes réalisées pour l’émission Les Argonautes. « Pour moi, ces nominations sont très importantes puisque c’est une reconnaissance des pairs », explique-t-elle en montrant un Gémeau qui trône sur une armoire.

Mais, son succès ne se limite pas à la province, elle est régulièrement appelée à voyager à l’étranger. Après Beyrouth, Berlin et Moscou, elle survolera bientôt le pays du dragon pour participer à la conception de costumes pour un spectacle de kung-fu. « Je ne suis pas vraiment en vacances en ce moment. Je viens ici pour m’abreuver et m’imprégner de la culture chinoise », ajoute-t-elle avec enthousiasme.

Rémy-Paulin Twahirwa

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