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Iran et Musulmanes québécoises

CHRONIQUE – Le ton est calme, avenant. Résonne, néanmoins, l’écho d’une détermination ancrée. Celle destinée à changer le cours des choses. À briser le stéréotype véhiculé, trop souvent péjoratif, entourant les québécoises de foi musulmanes.

Lina Bensaidane est avocate. Au propre et figuré, donc. Parce que le combat afférent à l’islamophobie est sien. Algérienne déménagée enfant à Québec, elle demeure marquée – comme l’ensemble de sa communauté – par l’attentat de la Mosquée.

-C’est une toute petite communauté, donc tous se connaissent. L’une des victimes tenait une boucherie, tout près. Une autre, un prof d’université, suivait des cours de spinning avec mon père.

-Qu’as-tu pensé ou conclu, post-attentat?

-Que c’est évidemment un geste isolé d’un fou furieux…

Pensive, elle ajoute  :

-Faut dire aussi qu’il n’y a rien qui nous aide un tant soi peu, dans l’espace public. Notre présence est pratiquement invisible, notamment dans les médias.

-Il est donc plus aisé de perpétuer des préjugés…

-Bien sûr. Mais je crois aussi, et surtout, que les Québécois sont absolument de bonne foi. On sent à l’occasion une certaine réticence, au début, c’est-à-dire avant de nous connaître, mais une fois la glace brisée, franchement, on s’aime bien. Les expériences vécues sont systématiquement positives, vraiment.

-Suffit de se connaître, donc.

-Oui. Mais il y a l’empathie, aussi.

Un peu d’humanisme?

-Voilà. Tu vois, après les attentats, j’ai pu être épaulée par une multitude de copines de « souche souche souche »!

Elle sourit.

***

Quelques jours auparavant, Lina publiait sur Twitter l’évidence suivante :

Ma mère porte le voile, moi non. Ma vie n’a jamais été mise en danger parce que je ne porte pas le voile. Comme la majorité des musulmans au Québec, j’ai le choix. Les femmes en Iran n’ont pas ce choix. C’est cet absence de choix qu’il faut condamner. Pas les femmes voilées.

Énormes, les réactions à ton tweet.

-Tu parles. Pourtant, il me semblait mentionner une simple évidence, comme tu dis. Faut croire que non, à voir la réaction de certains.

-Qu’est-ce qui t’a amené à le publier?

Les attaques et insultes islamophobes à Montréal-Nord et ailleurs au Canada, en lien avec l’Iran.

-C’est dégueulasse.

-J’ai trouvé ça particulier qu’on m’interpelle là-dessus. Évidemment que je suis parfaitement solidaire avec ces femmes, franchement, ça va de soi! D’ailleurs, et si j’habitais là-bas, comme musulmane ne portant pas le voile, très clairement que je serais aussi visée…

-Ironique.

-Oui. Et au final, comme je l’expliquais dans mon tweet, tout est une question de choix.

-Qu’est-ce que tu réponds à ceux et celles qui affirment que comme certaines Musulmanes, même québécoises, ne portent pas le voile par choix, il faut donc agir? On parle, selon les études du sociologue Eid, d’un 5% , ici.

-Je suis désolée, sincèrement, pour celles qui sont forcées de le faire. J’ai de l’empathie, justement, par exemple quand je pense aux Shaffia. Pauvres femmes. Le droit criminel doit agir, dans des cas semblables, évidemment. Faut prendre les mesures nécessaires.

-Les hommes Shaffia sont en tôle, d’ailleurs.

-Exact. Et tu sais, des abus, il y en a dans toutes les communautés, pas seulement chez les Musulmans.

-Bien entendu.

-Et comme tu le disais tout-à-l’heure, les empêcher de travailler, je vois mal en quoi ceci aiderait la cause.

Il y a de l’espoir, à ton avis, afin de casser l’islamophobie?

Elle réfléchit.

Avec de l’empathie et un peu de temps, oui, je le crois. Vraiment.

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