Les Canadiens en séries, payant pour les restaurants?
Le parcours des Canadiens de Montréal jusqu’en finale de la coupe Stanley a été salutaire pour les restaurateurs, dont la fermeture forcée des salles à manger pendant la majorité du printemps a limité les revenus. La pénurie d’employés a toutefois restreint les gains potentiels.
Il n’en demeure pas moins que l’impact des séries sur l’achalandage des restaurants non seulement à Montréal, mais dans tout le reste de la province a été «fantastique».
«Les journées généralement moins achalandées pendant lesquelles il y avait des matchs ont pu générer une consommation importante, explique le responsable des communications de l’Association Restauration Québec (ARQ), Martin Vézina. Ça fait vraiment du bien, surtout après la pandémie.»
Les événements sportifs représentent la pierre angulaire de certains établissements, comme la Station des sports, qui compte trois locations distinctes sur l’île. Malgré la forte demande, celle qui est située dans Montréal-Est, près de la station Berri-UQAM, est demeurée fermée, faute de main-d’oeuvre.
Seulement 10% des employés de la chaîne sont retournés au travail, selon le propriétaire, Peter Sergakis. «C’est certain que ça aurait été profitable d’ouvrir si on avait eu toute notre équipe, se désole-t-il. Malheureusement, c’est le problème de tout le monde dans l’industrie: tu es content quand tu embauches quelqu’un, mais tu perds deux personnes le lendemain.»
D’autres restaurants ont tenus le fort malgré le manque de bras. Mais les compromis ont été nombreux, comme la fermeture les midis et certains jours de la semaine.
«Ils ont tout fait pour rester ouvert, convient M. Vézina. Ils essaient de maximiser leurs journées d’ouverture, et d’éviter que les employés se fatiguent.»
Enthousiasme modéré
Selon les données de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain (CCMM), 22% des travailleurs de la restauration aurait quitté le milieu pendant la pandémie.
«La pénurie de main-d’œuvre et les tensions sur le marché du travail seront le dossier le plus chaud de la prochaine année. Ça va être extrêmement dérangeant: ce n’est pas une question de salaire, mais simplement qu’il n’existe pas assez de gens prêts à travailler», constate le président de la CCMM, Michel Leblanc.
La lumière au bout du tunnel, on la voit. Mais ce tunnel-là est long, très long.
Peter Sergakis, président de l’Union des tenanciers de bars du Québec
Le retour des étudiants dans la métropole, partis à la maison durant la saison estivale ou demeurés à la maison en raison des cours à distance, palliera partiellement le manque.
«Sinon, avec les compensations financières données par le gouvernement, je pense que les gens sont devenus un peu paresseux, estime M. Sergakis. On verra lorsqu’elles ne seront plus offertes.»
La solution pourrait également venir de l’État. L’accès temporaire à des travailleurs étranger doit être simplifier, estime l’ARQ. La réduction de l’écart salarial entre les serveurs et les cuisiniers faciliterait aussi l’embauche, considère-t-on.
En raison des pourboires, 12$ séparent les salaires horaires des deux postes. «On aimerait faire quelque chose par rapport aux pourboires, mais la loi ne le permet pas, se désole M. Vézina. Présentement, on doit augmenter le salaire des cuisiniers, ce qui augmente le prix des repas.»
Assouplissements bienvenus
Tout le Québec est maintenant en zone verte, ce qui signifie que dix personnes de trois résidences distinctes peuvent s’asseoir ensemble à la même table. Pour les terrasses, jusqu’à 20 personnes sont acceptées par table.
Les bars doivent limiter à 50% leur capacité. Les tables doivent se trouver à deux mètres entre elles, et en tout temps, les clients doivent demeurer assis.
Au fil des séries, Montréal a traversé la zone rouge, puis la jaune jusqu’à la verte, le 28 juin. Au début de la demie-finale, un assouplissement spécial a été accordé aux propriétaires de bars. La vente d’alcool a alors été poussée à minuit et la fermeture au maximum deux heures plus tard. Il avait été précédemment annoncé que les bars et les restaurants devraient servir leurs dernières boissons à 23h et fermer à minuit.
L’objectif était «d’éviter de se retrouver à l’intérieur des domiciles privés», rappelle le ministre de la Santé Christian Dubé sur les réseaux sociaux. En outre, «c’est bien pour l’économie locale, s’était réjouit Michel Leblanc. La trajectoire d’ouverture des bars et des restaurants est bien contrôlée.»
Ce déconfinement progressif des restaurants est salué par l’ARQ. «Il y avait toujours des délais entre les annonces et les ouvertures, mais c’est ce qu’on voulait, dévoile M. Vézina. Ouvrir un restaurant, ce n’est pas comme ouvrir une boutique de souliers: il faut commander la nourriture, préparer le personnel et les salles.»
«On a préféré demeurer fermer que de jouer au yo-yo, comme ça été le cas durant la deuxième vague, poursuit-il. Des restaurateurs ont perdus des dizaines de milliers de dollars, en ouvrant et en fermant subitement. C’est aussi nuisible pour le personnel, parce que plusieurs employés ont quitté le secteur.»
Le déconfinement des restaurants a été «un peu trop lent, mais prudent», considère M. Sergakis. «Finalement, on a qu’à regarder les résultats pour comprendre qu’ils ont pris les bonnes décisions. Mais avec la vaccination qui avance, il faudra laisser les restaurants aller à 100% de leur capacité», demande-t-il.
Dommages limités
Contrairement à ce que craignait l’ARQ, la fièvre des séries a mené à très peu, ou aucun grabuge. Que ce soit à l’intérieur ou à l’extérieur des restaurants, aucun dommage matériel n’a été recensé.
Lors de la victoire des Canadiens en demi-finale de la coupe Stanley, le soir de la St-Jean Baptiste, les partisans ont pris d’assaut le centre-ville. Quelques dégradations ont été recensées dans le secteur du Centre Bell et de l’avenue des Canadiens-de-Montréal, notamment sur du mobilier urbain.
Cependant, le directeur général de Montréal Centre-Ville, Glenn Castanheira, a parlé d’une soirée exemplaire où les fans du Tricolore ont fêté leur victoire au centre-ville «dans le plus grand respect que l’on pouvait espérer». «Rien qui ne se règle pas avec un bon coup de balai», a-t-il précisé au micro d’Ici première, concernant les dommages constatés au centre-ville.
«On est très fiers de nos policiers qui ont fait preuve de professionnalisme, de sang froid et de savoir-faire, et qui sont intervenus très rapidement lorsque les premiers débordements ont débuté. Et cela a permis de ramener le calme et la paix au centre-ville au courant de la nuit», a également commenté l’inspecteur du SPVM David Shane.
Ce soir-là. le SPVM a procédé à 15 arrestations dans les événements post-match, surtout pour des méfaits, pour entrave au travail des policiers et pour voies de fait sur un policier. Au total, huit voitures de police ont été vandalisées, deux policiers ont été blessés et 50 constats d’infraction ont été émis.