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«Per te.»: l’insoutenable légèreté de l’âme

Julie Hamelin
Le metteur en scène Daniele Finzi Pasca, de la compagnie Finzi Pasca, présente à Montréal le spectacle Per te., dédié à Julie Hamelin Finzi. Photo: Josie Desmarais/Métro

D’un drame naît parfois un souffle, une inspiration: trois ans après sa création, la compagnie Finzi Pasca présente finalement à Montréal Per te., spectacle dédié à sa co-fondatrice Julie Hamelin, décédée en 2016.

Per te., «pour toi» en italien, est présenté pour trois soirs au Théâtre Outremont. C’est-à-dire à deux pas de l’endroit où le couple formé de Daniele Finzi Pasca et de Julie Hamelin habitait lors de ses séjours à Montréal. 

Co-fondatrice du Cirque Éloize, la Montréalaise Julie Hamelin a également participé avec son mari au rayonnement planétaire de Finzi Pasca, qui a monté cinq opéras, deux spectacles du Cirque du Soleil (Luzia et Corteo) et trois cérémonies olympiques.

Cette association professionnelle, humaine et amoureuse a pris fin brutalement le 14 mai 2016, jour du décès de Julie Hamelin des suites d’une maladie cardiaque à seulement 43 ans.

«Ça nous a tirés du cheval qu’on venait de monter, illustre Daniele Finzi Pasca, metteur en scène et créateur originaire de Suisse. Sa mort nous a surpris et nous a laissés avec tellement de questions.»

«Ça n’a pas été simplement mon deuil, mais celui de toute un groupe de personnes qui la connaissaient parfois depuis
20 ans. C’est un choc gigantesque qu’on a vécu ensemble.»

Per te. est né de cette commotion. Le spectacle met en scène une troupe de théâtre qui, à trois mois de sa première, est en pleine répétition et se questionne sur la façon de raconter une histoire.

Un peu comme la compagnie Finzi Pasca, qui quelques semaines seulement après la mort de Julie Hamelin, a dû plancher sur un nouveau spectacle, qui est devenu Per te.

«On se sentait déstabilisé parce que Julie, c’était comme une reine. Notre reine… avoue Andrée-Anne Gingras-Roy, musicienne et comédienne. On n’avait plus nos repères. En création, on a dû se serrer les coudes pour avoir la force de surmonter ce deuil.»

«Une perte comme celle-là laisse des interrogations, des envies, des choses qu’on aurait à dire, qu’on aurait pu dire», ajoute Daniele Finzi Pasca. «On s’est tellement interrogés sur comment on pouvait arriver à faire un spectacle un mois après son décès. On a commencé sans même savoir si on allait finir.»

«On a pensé ce spectacle pour parler de nous, gens de théâtre. C’est une façon de raconter nos blessures et nos joies.» Daniel Finzi Pasca, créateur et metteur en scène du spectacle Per te.

Julie Hamelin
Daniele Finzi Pasca,

Aux dires du metteur en scène, la pièce fait entrer le public dans cette grande répétition qui conserve un côté inachevé. Un endroit un peu étrange où dialogue lourdeur et légèreté, à l’image de ces acrobates en armure qui peuplent la pièce. La présence de Julie y demeure aussi très forte.

«Julie a été malade pendant des années d’une maladie très, très étrange: son cœur était en train de se calcifier. Mais personne ne s’en est rendu compte. Seules quelques personnes dans la compagnie étaient au courant, parce qu’elle voulait se montrer comme une guerrière. On a donc cherché à explorer le langage des guerriers, un langage épique.»

Il est en effet plutôt épique de voir un chevalier habillé d’une authentique armure pesant près de 40 kilos tourbillonner sur cette espèce de hoola-hop géant qu’est la roue Cyr, comme on a pu le voir lundi en répétition.

«C’est un travail différent de ce qu’on fait habituellement avec des acrobates. Normalement, on cherche à les mettre dans les meilleures conditions pour qu’ils puissent évoluer dans l’espace», explique candidement Daniele Finzi Pasca.

«Se donner des ailes»

Malgré les kilos de métal qui habillent ses artisans et la lourdeur de son thème, Per te. se veut un spectacle léger.

«Pas d’une façon superficielle, mais plutôt dans le sens de se donner des ailes», rassure son créateur. On fait dialoguer la pesanteur, la façon dont la vie te met parfois de gigantesques cailloux dans les poches, et la légèreté, comment certaines choses aident à surmonter tout ça.»

L’humour et la poésie sont de précieux alliés pour surmonter le deuil, et, comme tous les spectacles de Finzi Pasca, Per te. en est rempli. Après tout, Daniel Finzi Pasca est reconnu pour son «théâtre de la caresse», approche alliant geste, émotion et multidisciplinarité.

«On s’est demandé comment parler avec une certaine légèreté de sujets très durs, indique Évelyne Laforest, acrobate. Julie était quelqu’un qui aimait la légèreté. Elle aimait rire et déconnait tout le temps. C’est sûr que cette énergie a teinté la création, malgré la lourdeur du sujet et du moment dans lequel ce spectacle a été créé.»

Une part de Montréal

Le parcours de la compagnie Finzi Pasca est souvent passé par Montréal. En plus de s’y produire régulièrement, elle a produit le grand spectacle Avudo, présenté dans le cadre des fêtes du 375e.

Il est donc naturel que la ville occupe une  place dans cette création. «Un peu de neige et une certaine poésie», résume le metteur en scène, qui ne veut pas trop en dire.

Chose certaine, la troupe, qui compte plusieurs Québécois, est très heureuse d’atterrir à Montréal après avoir présenté Per te. dans 11 villes dans le monde. 

«Au cours des dernières années, on a continué à porter des images que Julie voulait créer avec Daniele, dit Stéphane Gentilini, acrobate. On arrive un peu à la fin de toutes ces images-là. Ça fait plaisir de montrer le spectacle qu’on a pensé pour elle à tous ses amis qui n’ont pas pu le voir en tournée.»

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